J’ai en mémoire la phrase d’un ami: “je vais au cinéma pour penser le moins possible à la mort“. Louable. J’espère qu’il n’est pas allé voir Last Days de Gus Van Sant. Il est en effet question de ça, après un Elephant qui continue à me partager un peu plus chaque jour. Film brillant, attitude de poseur, clairvoyance, simplisme, Elephant est bouleversant pour pas mal de raisons. Last Days propose un sujet à la mode, le bio-pic trèèèèès largement inspiré par les derniers jours de Kurt Cobain. Même si la ressemblance et le mimétisme de l’acteur principal Michael Pitt est frappante, pas besoin d’aimer ni de connaître le leader de Nirvana qui a fini par se faire sauter la cafetière. Beaucoup de ressemblance donc avec Elephant mais avec des passages en miroir renversé. Alors que la mort y était le couperet final, asséné en quelques minutes, la déchéance de Michael Pitt dure un film entier. Cette agonie est largement plus saisissante que les récents films du genre qu’on a pu voir (souvenons-nous du pathétique “The Passion of the Christ“). Ce n’est pas non plus le premier film du genre. Gus Van Sant transcende son sujet, dépasse le mythe du rocker, et assène quelques moments grandioses. “Quelques”, oui, car il ne se passe pas grand-chose. Mais le peu qu’il s’y passe prends aux tripes. Les dialogues sont extrêmement réduits, quand ils ne sont pas tout simplement bredouillés. On virevolte avec ce pantin désarticulé, on suit sa douleur qui glace le sang. Des plans audacieux dans un film sobre (ce passage au petit matin derrière la vitre, wow!). Pas aussi génial qu‘Elephant, mais avec un sujet moins dangereux, sans parti pris, Last Days est un film expérimental simple, triste, élégant et intelligent.