La mort d’un dessinateur, c’est toujours triste. L’histoire raconte qu’Alex Toth est mort sur sa table de dessin (un jour de printemps de 2006, un jour après mon anniversaire, facile pour que ça reste). Un dicton africain dit que quand un vieillard meurt, c’est toute une bibliothèque qui disparaissait. Un dessinateur, c’est un peu la même chose mais en carnet de dessins, les taches de crayon 3B et d’encre en plus. Toth n’était certainement pas le plus connu, ni le plus médiatique. A vrai dire, j’ai connu son travail il y a 5 ans. Vous pouvez wikipédier sa carrière tout ce que vous voudrez, découvrir les dizaines de dessin animés auquel il a participé (sans parler des bd), son importance dépasse en réalité sa carrière, à la manière de Will Eisner ou de Carl Barks, les « makers », souvent dans l’ombre de leurs travaux.

Sorti de peu à titre posthume, ce doodle book nous invite dans l’intimité de Toth, sa correspondance avec son ami John. Alex Toth était un dessinateur acharné. Un as du crobar, la vision claire d’un regard habile, mais surtout un annotateur fou. Pas de Pc à l’époque, il gribouillait ses idées, ses réflexions, et commentait, commentait… Une espèce d’autocritique permanente et lucide. Un bon dessinateur est avant tout un fin observateur. Ce bouquin est un sublime travail au résultat un chouia amer. La rigueur du papier griffonnée et le glorieux temps de l’aéropostale a disparu au profit des mails, de la Wacom et du SMS que certains fous tentent de nous faire passer pour des haïkus modernes. Ce doodle book, c’est ça, un mec hors du temps, une impertinence du trait qui vous nargue en écrivant de sa radicale écriture : « Keep well –and get a BIG FAT LEAD PENCIL or CHARCOAL – and DRAW, DRAW, DRAW ! »

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