Archive for May, 2012

Ce qui valait la peine

Pas très productif en ce moment, pas vrai ? Comme d’habitude, tout est pensé à l’avance, projeté, tapé… Mais quelque chose ne va plus.

Plus que l’absence de mise à jour et de nouveaux articles, les lecteurs les plus fidèles ont peut-être remarqué une pessimiste et triste pente qu’a pris mon travail le plus récent ici ou .

Alors d’abord un mot d’excuse. Ma méthode habituelle, c’est d’esquiver au maximum le  “je”, et de plutôt utiliser l’expérience personnelle dans mes articles, quand le besoin s’en fait sentir. Parce que je ne suis pas persuadé que parler frontalement de soi-même améliore le résultat plus qu’il ne soulage. Mais là, je vais déroger à la règle, pas de circonvolution pour diluer, voilà la vérité, prise au fond du puits.

Je ne crois pas non plus aux “show must go on“. Continuer comme si de rien n’était, c’est un peu comme me mentir, un peu comme serrer la pogne d’un mec que tu méprises. Une raison parait-il suffisante pour ne pas rentrer en politique.

Mais là, je n’arrive plus à grand chose. Même mes habitudes ne me guident plus.

Perdre ma mère.

Perdre ma mère est la chose la plus douloureuse. Et rien, rien ne semble atténuer ma peine.

On a parfois du mal à pointer le moment le plus douloureux de sa vie. Je crois que j’y suis, là, très précisément. Et rien ne semble atténuer cette peine, si ce n’est les regrets. Quasi aucun. C’est sans doute ce qui arrive quand on accompagne quelqu’un dans la lente voie de la maladie. Quand la mort arrive à portée, on finit par se dire les choses que les vivants ne se disent plus.

Pourtant de vie, elle n’en a pas manqué, jusqu’au dernier souffle. Elle riait en roulant les “r” comme tous les gens qui sont nés et ont vécu dans le bloc soviétique. Je l’entends, elle rit encore dans ma tête. Sa vaillance a surpris tout le monde, moi le premier. La fragilité de tout ce que l’on aime.

Je tiens à remercier tout ceux qui m’ont témoigné, de quelque manière que ce soit, un message d’amitié. Si j’écris cela, aujourd’hui, aussi frontalement, c’est aussi pour essayer de retrouver le courage de… De travailler, sans rien oublier. Au fond, j’aimerais bien arriver à cette plénitude dont m’ont parlé ceux qui sont déjà passés par là. De croire que tout l’or de ces vies finisse par survivre en nous. Je n’y suis pas encore.

Après tout, il n’y a plus vraiment de choix. Espérer la retrouver un jour, pour s’abandonner dans cette conscience, ce quelque part où s’arrête la souffrance.
Ou bien, moins heureux, forcément plus sombre, entamer un deuxième chapitre de vie.

Le voyage valait bien la peine d’être fait une fois.

We bought a zoo

Le principal reproche qui revient à propos de We bought a zoo tient uniquement à son affiche. Scarlett Johansson, moins belle qu’elle ne l’a jamais été, moins sexy que nos pires cauchemars, et tout cela à cause d’un gros Photoshop FAIL.

La vérité, c’est que dès sa toute première scène, elle y est habillée avec une élégance toute normande des mauvais jours, des bottes en caoutchouc à la capuche d’un coupe-vent usagé ? La combi de Black Widow parait déjà si loin. Est-ce que ça vaut le coup de continuer dans ces conditions… ? Et puis, franchement… un zoo ?

We bought a zoo cache aussi son véritable sujet derrière cette affiche loupée. Ce n’est pas tant un film sur un mec qui décide de vivre dans un zoo racheté avec tout l’argent du veuvage, au milieu de nulle part avec ses deux enfants. Un film sur le deuil, sur l’impossibilité de se consoler autrement qu’en se fixant un but absurde pour exister. Benjamin Mee (Matt Damon, toujours merveilleux de justesse et d’intelligence) a perdu sa femme. Et tout, absolument tout, lui rappelle ses années heureuses qui ne reviendront jamais. Ce qui nous amène à la réhabilitation d’un zoo, pour que le spleen de ses enfants arrêtent de les ronger. Tout simplement.

“Based on a true story” qu’ils disaient, comme pour nous faire oublier l’absurdité du procédé et la cruauté du destin. Mais la douleur jouée Matt Damon est perceptible à chaque plan, celle du mec qui souffre mais dont le seul garde-fou est ses deux gosses. Vraiment true story, maintenant ? Dévasté par le chagrin d’apprendre que sa mère n’avait plus aucune chance de sortir de son coma, Robert E.Howard, le génial auteur de Conan le Cimmérien, est allé chercher le Colt planqué dans la boite à gants de sa voiture.
Untrue story ? A la mort de ses parents, Bruce Wayne, que j’aurai passé toute ma vie à étudier, a déclaré la guerre au Crime tout entier. Et en priorité celui qui pollue sa ville. Un objectif qui semblera totalement vain pour quiconque ayant une approche un tant soit peu “réaliste” du Crime. Wayne va encore plus loin dans son travail de deuil, puisqu’il renonce à toute possibilité d’une vie amoureuse et d’une paternité traditionnelle pour sa lutte obsessive pour la justice.

Le deuil de Peter Parker est encore plus difficile puisqu’il est directement responsable de la mort de son oncle. À cause de son erreur, il ne renoncera plus jamais. Double peine, il doit aussi s’occuper de son Aunt May qui, la pauvre, en mourrait si elle apprenait qu’il est Spider-Man, le “hors-la-loi” que tout le monde recherche, ce qui fait de lui un personnage fictionnel plus tragique encore.

On en revient à acheter un zoo sur fond de musique de Sigur Rós, en pleurant en passant en revue les photos de celle qu’il aimait dans son disque dur. On se rattache à tout ce qui est possible, quitte à passer des journées à chercher le jpg d’un instant qui n’existe plus que dans son souvenir. Il faut trouver le moyen de vivre avec. Et si, en fin de compte, Scarlett Johansonn lui tombe dans les bras, ce ne sera pas une récompense qu’il aura démérité. Car que ce soit lui, racontant son amour balbutiant à ses enfants orphelins de leur mère, que ce soit Thomas & Martha Wayne, une épouse décédée ou Oncle Ben, on ne s’en remet jamais. C’est final.