Cinématographe

Still Walking

En 2 heures, Kore-Eda tricote un costard sur mesure à cette famille qui fait semblant de se comprendre et se parler. Si Still Walking était anglais, il serait un film de Mike Leigh. Il balance ses bombes sourdes dans un cadre familial pépère. Ozu, Leigh, Deplechin, même combat ? Le film occupe le terrain du film nostalgique japonais, les petits bleds bruités aux criquets. Manquait plus que de l’aquarelle par dessus, et on passait ses vacances d’été dans un début de film de Miyazaki.

Une famille se retrouve régulièrement, pour commémorer la mort d’un fils ainé. Les parents, toujours dans la même baraque de Yokohama, semblent figés dans le temps, un peu comme une télé branchée sur Drucker depuis des années. A force de porter le deuil, ils ont oublié de passer à autre chose. La mémé va cuisiner avec les gamins de l’autre fils, l’autre là, celui qui a choisi de ne pas faire docteur comme son père. Il ne se passe pas grand chose dans Aruitemo, aruitemo. Les cadres y sont presque Ozu-esque, la photo est léchée. Alors quoi, une autre gravure mélancolique sur le temps qui passe ? Nope. Tout le monde y est un peu blessé. Malgré les apparences, tout le monde a un peu dérivé de son côté. Il y a une subtilité incroyable dans ce Kore-Eda (loin du bizarre Air Doll) dans sa manière amicale mais ferme (comme dirait Raffarin) de tailler le portrait de cette famille. En prime, des acteurs d’une justesse folle.

Alors quoi, Still Walking, meilleur film japonais de l’année ? Tu parles. C’est un des films de l’année tout court. S.O.S le cinéma japonais, parfois pas tant que ça.

L’Imaginarium du Docteur Parnassus

Un mec à sa meuf à l’entrée du dernier Terry Gilliam : « non mais j’avais vraiment aimé son dernier film, là, avec un coupe-tif qui chante ». Châtiment corporel : non seulement le gus confond Gilliam avec Tim Burton, mais en plus il a aimé Sweeny Todd. Mais on va l’épargner : le style graphique, la direction artistique rococo-cracra fait méchamment penser à du Burton tardif. Film fourre tout au titre nawak (l’imagina-mandarum du docteur Parnassum ? Whatever.), il bénéficie d’emblée d’un capital sympathie ahurissant puisqu’il réussit à mettre en valeur sa star tombée au combat (Heath Ledger, toujours bon) et être cohérent avec les mecs qui le remplacent dans certaines scènes. Et attention, Johnny Depp, Jude Law, Colin Farell. Le pack hormonal. T’es une fille, t’en aime au moins un. Ou les trois en même temps, coquine.

La roue de secours collerait presque, s’il n’y avait pas ces petits moments qui donnent l’impression d’une grosse rustine, d’un post it fluo. C’est élégant mais pas gégé. Et malgré toutes ces bonnes intentions, on a l’impression de voire un best of visuel de Gilliam. Comme Gondry, il nous balance son savoir-faire de bricolo à la gueule. Cradingue et clinquant, visuellement proche de ce que j’imagine être dans la tête de Raël, Parnassum montre surtout, sans être un film passionnant, un des talents de Terry, celui de faire le cinéma de l’impossible. Ce type, dont on dit même qu’un barbecue dans son jardin tournerait mal, reste cohérent jusqu’au bout. Ca passe.

Un cadeau pour les vrais : High Rez pics d’Iron Man…

Un cadeau pour les vrais : High Rez pics d’Iron Man 2. Enfin plutôt de Scarlett Johansson as Black Widow. Un point c’est tout.

Micmacs à tire-larigot

Je vois tellement de crasse déversée sur le dernier Jeunet que je me sens obligé de prendre ici la défense de Micmacs à Tire-larigot. Ouais, paye ton titre nul. On va d’abord commencer par ce qui ne va pas. Je comprends complètement le raz le bol qu’on peut avoir pour l’esthétique globale du mec. Le filtre irréaliste jaunâtre bizarre qui va jusqu’à se moquer de lui-même et surtout d’Amélie Poulain. Stop, ça, on n’en peut plus. Les personnages sont assez mal introduits dans l’histoire, toujours dans la caricature éhonté qui cabotine, qui force le trait manichéen des gentils clodos qui font du bricolage comme des minipouss’ dans leur cave face au méchant consortium des armes. De vrais Dassaults qui détestent même leurs enfants, les immondes. Ca tombe bien, Serge Dassault ne peut pas encadrer son fils depuis que celui-ci lui dispute la légitimité de l’entreprise de pépé. Famille Ump powered. Ou alors, ils collectionnent les goodies macabres, genre les ongles de Pol Pot, le slip à Mussolini, le dentier de François Mitterrand. Ouh qu’ils sont méchant. Dans Micmacs, tout est agité à tel point que ça en devient horripilant, tendance les Visiteurs 2 (wouh les grands mots). Tu souscris à l’univers ou pas, perso, la dictature de la gentillesse heureuse, du bon sentiment qui crie et qui s’agite, du Yolande Moreau, c’est nein. Ceci étant…

Le film est construit assez intelligemment, comme une bd, montant en épingle ses Némésis. Mais ce que Micmacs fait le mieux, c’est de mettre en valeur l’esprit d’équipe façon l’Agence Tout-Risque. X-men 3, étron devant l’éternel, avait au moins une qualité, c’est de faire fonctionner son équipe, de développer une espèce de cohésion. Ce teamwork, assez Pieds nickelés moins l’arnaque, permet à presque tous ces personnages très cons cons d’arriver au bout de leur processus, sans faire trop poseur. Sans être franchement mal écrit, le dernier Jeunet ne mérite sans doute pas qu’on lui vomisse dessus car, dans le pire des cas, c’est toujours mieux que tout ce que fait Tim Burton depuis qu’il est marié.

Blood the last vampire

Pour ce SOS Cinéma Japonais, je me suis tapé pas mal de séries Z, de nanar pur sucre, la plupart du temps des trucs cools où ça flingue, ça découpe, avec des tenues minimalistes sur des seins refaits pour les filles. Onechanbara, l’assemblage de deux genres majeurs (les jolies filles et les zombies) était réalisé avec la même volonté cynique d’un Joséphine ange gardien : « il y a bien un public pour ça donc on fait notre daube». Oui, d’accord, mais c’est pas une raison pour ouvrir des sandwicheries Subway partout. Mais qu’est ce qui explique Blood The Last Vampire ? Bon, ce n’est presque pas un film japonais, le réalisateur étant Chris Nahon (remember l’empire des loups ou le Baiser mortel du dragon, tant de bonheur…. Bon allez, autant vous spoiler, Blood est nul, mais l’Empire est un de mes classiques du nanar. Il y a cette séquence où le docteur annonce, la voix grave, le synthé du stress en stabilo, à l’héroïne que dans une vie antérieure, elle était turque, à chaque fois je me fends une cote. Et puis le flic qui va sur Yahoo pour démanteler un réseau de ninjas trafiquants de drogue qui a eu la bonne idée de foutre tout l’organigramme de l’organisation accompagné de fiche avec photo de ses membres pour que ça soit méga easy. Price-fucking-less. Le baiser mortel, débile, avait au moins un Tcheky Karyo à fond les ballons, qui nous jouait son meilleur « shoot the girl first », le rôle de sa vie, ainsi qu’une scène de baston finale versus Jet Li absolument géniale, sans doute ce qui s’est fait de mieux avec deux français qui font des coups de pieds sautés dans un commissariat. Selon les critères de Brice Hortefeux. Bon, c’est du cinéma inepte, mais on en retire parfois des petits moments classieux. Mais ça, c’était avant.)

A l’origine, c’est parti comme un projet cross-média. Romans, jeux vidéo, Animé, le tout sous l’œil distrait de Mamoru Oshii. Saya est une chasseuse de vampire habillé en collégienne japonaise, elle-même un peu vampiro sur les bords. High concept, mec. Elle va infiltrer une base riquaine en territoire japonais pour dégommer un maximum de vampires. Je ne suis pas certain qu’il restait beaucoup de chose à dire ni même à penser de Blood, mais le marketing a décidé de cocher aussi la case film live sur le planning.

Tourné un peu en Chine et en Argentine, cette version live est unifiée par un filtre jaunâtre hypnotique à l’Amélie Poulain. Dire que le subterfuge est total serait se mouiller un peu trop. Tout le monde a l’air de jouer dans un film différent, comme si la VO n’était qu’en fait un redoublage par-dessus une version tchécoslovaque. Rien ne va, on rit puis on dort. On va pas tourner autour du pot: décharné, ce nanar pur sucre n’est même pas agréable à regarder, n’a même pas assez de barbaque pour qu’on marre. Même le sang en CG est nul. Si vous aimez ce film, vous avez tort. Il existe des courbes pour le prouver.

bien mérité le