Cinématographe
Babel
Dec 10th
Inárritu avait déjà fait fort avec l’horripilant 21 grams, sirupeux mélo uniquement basé sur la forme « je me prends pour un artiste et je bricole le film dans le désordre ». Chaque scène était un appel à une attaque lacrymale. Si ce n’était pas l’accident mortel, c’était la belle blonde qui se drogue et ainsi de suite jusqu’à ce que l’histoire se dégoupille d’elle même, le scénario se siphonnant dans la cuvette.
Babel, c’est le concept vu et revu du battement d’ailes d’un papillion. Tout commence par 2 mômes au Maroc qui tirent sur un bus avec un fusil, arme que leur père a acheté à un autre mec qui s’est lié d’amitié avec un japonais lors d’un safari, ce même japonais ayant une fille sourde et muette (ce qui n’a absolument aucun rapport mais on pourra insérer ainsi des plans clichés « lost in translation »). Leur bavure a fait une victime. La femme d’un couple, parti loin pour oublier la mort de leur troisième enfant (attention les violons), agonise loin de tout hôpital (forcement, au Maroc, y’a pas d’hôpitaux) pendant que ses jeunes enfants franchissent la frontière mexicaine accompagnés par leur baby-sitter qui désire se rendre au mariage de son fils. Que de destins qui se croisent, et tant de raison de se dire « ah la vie, c’est vraiment trop béta quand ça se goupille ainsi ». Ce ramassis de mélo simplistes au possible est d’autant plus risible que sa cohérence même est mise à mal par tout un tas de détail interne : miracle balistique de début qui ferait passer toute la filmo de John Woo pour du documentaire sur les armes à feux, détail à l’avenant, liens qui unissent les personnages absolument minuscules, improbables et poussifs. C’est simple, après ce long exercice de style, on se rend compte qu’il n’y a RIEN durant ces 2h15. Du vide soi-disant auteuriste. Ah et toute l’ironie de la vie cruelle quand les pièces du puzzle se réassemblent. Dans un Lelouch, Bernard Tapie n’avait plus que quelques jours à vivre, et puis miracle, son cancer est guéri. Wow, trop jouasse ! Juste après, il monte dans son hélico, qui s’écrase tout de suite après. Babel, c’est pareil mais en international. Trop con.
Coeurs
Dec 9th
Un bon titre bien monosyllabique. Quand on opte pour ça, n ne doit pas se planter. En général les adaptations de pièces de théâtre, comme c’est le cas ici, nous offre des petits moments d’acteur. Mais là, rien ne fonctionne. Lambert Wilson joue un mec alcoolique comme lorsqu’on fait semblant d’avoir bu entre copains, le genre « beuuuuar j’ai trop bu ». Arditi, tout en retenue est peut-être le seul d’à peu près convaincant, façon Crédit Lyonnais… Mais les autres, olalala. Même Claude Rich qu’on ne voit pas à l’écran surjoue. Pour le reste on nage en plein « ailleurs de la vraie vie ». Machin voit une vidéo où l’on voit une femme (juste le corps, hein pas la tête, faut pas pousser trop loin) danser en porte-jarretelles et sa sœur s’exclame en le surprenant « oh mais tu regardes du porno ! Mais que j’ai honte !» outrée. Le même machin, agent immobilier, voit sa cliente renoncer à un achat et faire une mine déconfite. Hein quoi ? Un agent immobilier à Paris, qui est triste de perdre un client ? Come on, wake up !! Mais le pire, c’est ces discutions de bar d’hôtel de luxe sur l’amour, sur un ton désabusé. En général, la phrase commence par « L’amour, c’est comme du fromage râpé, au début on en étale beaucoup, mais quand il en reste plus que la fin du paquet, alors on essaye de le faire durer ». Ca marche aussi avec les cacahuètes, la bouteille de vin etc. Mais pour en revenir plus spécifiquement à Cœur, on se dit toutes les 5 minutes, « bon, il va se passer un truc énorme, un gros renversement, quelque chose ! ». Mais rien, c’est comme si on avait 6, 7 gus complètement en dehors de toute réalité dans un endroit supposé être Paris recouvert de neige. Ah oui, la neige, elle ponctue tout les changements de scène, ce qui est sans doute l’effet de cinéma le plus ringard avec les pages qui se tournent dans Star Wars. Sinon, zéro proposition, on remballe tout.
Dans Paris
Nov 28th
Dans Paris, ou le film du « Mouif ». Quel intérêt de faire un film « nouvelle » vague en reproduisant des schémas, une méthodologie cinématographique ? Ca n’en a pas vraiment en soi, du coup il faut chercher le pourquoi du comment ailleurs. Romain Duris, ok il est good. L’autre jeune, obligé de cabotiner, de simuler le bonheur avec une pointe de malaise, on est un peu plus gêné pour lui. Mais où l’a-t-on vu ? ah mais ouais dans le risqué « Ma mère » d’après Bataille. Du même réalisateur. Okkkééé on comprend mieux maintenant. Très bonne prestation de Guy Marchant, « l’excellent », adjectif simplet et agaçant que les gens en manque de vocabulaire collent à un acteur démodé passé au stade du culte on ne sait pas trop pourquoi. Il devrait jouer plus.
Une énergie du « non projet », une envie de faire vite, c’est ce qu’on ressent dans ce récit improbable de ces deux frères, l’un dépressif, et l’autre, plus cigale. Si votre came, c’est les films un peu poseurs, cinéphile sans risque, tendance fanboy cloneur, Dans Paris est fait pour vous. Le film bobo par excellence, du haut de son parti pris sans conséquence.
Nos Jours Heureux
Nov 7th
Il y a des jours comme ça, on oublie qu’on a vu des films. Un film vraiment pas mal et facile à oublier fut l’Interprète, avec Kidman, Penn. Bien joué, calibré, pleins de bons sentiments et pourtant totalement effaçable de sa mémoire. Que de points communs avec « Nos Jours Heureux », une comédie qui choisit la voie non risquée de rire avec les colonies de vacances. (Etonnant, ce côté anachronique style fin 80 mais présence de fax et d’une problématique récente : la sur-psychologie rigide des pédiatres etc) Attention, ouvrez la boite aux clichés : les booms, le camping sauvage à chanter autour du feu, premier flirt, course dans les sacs à patates, les moniteurs etc. Les mono, d’ailleurs, sont aussi bons que les enfants surjouent pour accentuer les traits de leurs personnages. Au final, un film « gentil ». Mais juste ça, le genre de comédie pas trop mal, interchangeable dans n’importe quel créneau 20h50 qu’il reste pour le cinéma à la tv. Un pas mauvais score pour la comédie française (comprendre moins pire que ce qu’on a l’habitude de voir).
Block Party
Nov 6th
Et si Block Party était le meilleur film de Gondry ? Documentaire sur le concert de quartier qu’organise David Chapelle (bien connu aux USA mais pas des masses en France), on a rarement senti autant de bonnes vibes autour d’un concert filmé, à la spontanée. On suit David, de l’organisation, filant des invitations dans un bled paumé, alignant un débit vocal ravageur. Tordant et spontané, l’invitation du réel est plus forte que tous les films bricolés en Knacky Herta du monde. Ce one shot à fond la caisse fait réellement vibrer, que l’on aime ou pas sa playlist (hé les Fugies reformé pour le film, The Roots ! etc) donne réellement envie de partager cette joie collective, perdue quelque part dans une rue de Brooklyn. Vraiment décoiffant !
Indigènes
Oct 27th
Indigènes méritait-il les éloges, la palme aux acteurs, le déluge d’éloges et d’émotions ? Il faudra bien distinguer deux choses : les effets du film, qu’on ne saluera jamais assez. Une des trop nombreuses injustices faites aux arabes de France (n’oublions pas qu’ils étaient tous français, les gus). Un film qui change la politique, la vie, la société, jeunes lecteurs, ça peut tomber au bac, prépare-toi à ça. Reste le film, et là c’est une autre histoire. Autant Roschdy Zem, sa vraie gueule de cinéma et sa filmo audacieuse peut enthousiasmer comme une petite pucelle qui s’égosillerait devant « Fan de », autant Nacery (Taxi 1234) et Djamel Debouze, coproducteur du film peuvent laisser perplexe. Pari à demi réussi : Samy ne joue qu’une dizaine de répliques dans ce (long) film, mais il est dedans, à fond. Djamel sautille sur le champ de bataille, un bras dans la poche, le fusil de l’autre, on dégage plus facilement un rictus. L’histoire de ce film, volontairement linéaire, unilatérale et ultra partiale ne dessert en rien son propos (souvenons-nous des Sentiers de la Gloire). En dehors de son gimmick de justice historique fort juste, ce n’est « qu’un » ultra-prévisible film de guerre de série B, lorgnant volontairement vers Private Ryan. La fin, dans le genre « fluo stabiloboss », on veut bien vous faire comprendre que c’est une injustice, est vraiment en trop. 10 mn too much à enlever, facile. Idéologiquement juste, Indigènes n’est qu’acceptable cinématographiquement. Ce n’est pas si mal vu la difficulté qu’on peut imaginer à monter un tel film. Oh et Roschdy Zem est super. Fan de la première heure, je vous dis.
*
- Scène “solitude du sniper” absolument pas dans le film, mais quand on y pense, le sniper ne se mets absolument pas en position idéale pour tirer… pas très logique.
La jeune fille et l’eau
Oct 13th
Tout a déjà été dit sur La jeune Fille et l’eau. Nanar cosmique, ridicule filmé avec aplomb, suicide artistique, tout. Des mots cruels qui font qu’inévitablement, 2 ou 3 poseurs le trouveront même sympathique voire même brillant, soit par nullité, soit par panache démesuré dans le Grand-Guignol. N.M.S. va au bout de son délirium installé par ses précédents films, une espèce d’autisme illogique qui ne rime plus à rien cinématographiquement. Mais plus que la stupidité de sa croute, ce qui rend triste, c’est la certitude. Oui, le film suinte de ce contentement de soi, un peu comme quand Lelouch vous parle du génie de ses dernières merdes, un cinéma « certes trop touffu, et qui nécessite d’être vu plusieurs fois »,(je le cite). La certitude artistique, c’est admirable quand elle croise la courbe du génie. N.M.S, on a la certitude sans rien avoir derrière, il développe son petit système habituels, ses effets entendus, et là, il va jusqu’au bout, en se donnant même le rôle de sauveur de l’humanité. Rien que ça. Tragique.
A défaut de trouver un sujet à dessiner, j’ai choisis de rendre hommage à mon camarade de banquette ciné, qui, effaré devant autant de conneries, se cachait sous son pull. Ses mots ont été “peut-être le pire que j’ai vu au ciné de ma vie”.
The Sentinel
Oct 4th
On dit que le centrisme est mou. Il y a pire, les films « de catalogue ». Des polars à petits suspenses aussitôt oublié dès qu’on les a vu. La nouvelle gloire de ce produit marketing est de vendre sa roublardise télévisuelle. Des stars des séries du moment. Bien entendu, il faut un M.C., Michael Douglas, dont la street-cred politique n’est pas à faire. Il est le garde du corps du président et saute même à l’occasion sa femme (Kim Basinger, nettement plus glamour que Bernadette Chaudron de Courcelles Chirac). On lui colle un copain mais rival un peu quand même, mais archi star TV (le gus de 24, qui maitrise donc à merveille le fusillade tout en discutant dans son oreillette façon Delarue). Ah oui, collons une pépé plutôt jolie (la jolie des Desesperate Housewives, avec des ass shot, rarement vu aussi gratuit depuis le cul d’Alyssa Mylano dans Double Dragon le film – référence -). Conspirations, coup monté, c’est tout vu, archi vu, et rerevu. D’ailleurs, j’ai du m’y prendre à 3 fois pour regarder ce film dans son intégralité (pratique ces télécommandes situés dans l’accoudoir pour faire pauser, retour rapide etc… Oui, je sais, le cinéma, c’est mieux en salle, mais bon, là, le support écran dans l’avion semble être le support approprié pour The Sentinel. On nage dans l’encéphalogramme plat de la proposition cinématographique puisqu’elle se tourne vers ses phénomènes TV devenus difficile à contrôler avec l’inflation de leur cachet, succès mondial aidant. C’est un cercle vicieux : plus il y aura de séries TV « massif show à ne manquer sous aucun prétexte », et plus il y aura ce genre de produit mou, téléfilm qui aura sauté quelques étapes lors de son brainstorming en choisissant le mauvais positionnement marketing.
(j’ai acheté pas mal de pinceaux différents, alors je fais des essais. C’est comme essayer une nouvelle manière de faire les pompes, au début on a du mal et après, ça vient. Enfin parfois).
Toute la beauté du monde
Aug 29th
Une critique inédite qui remonte au début de l’année, sans doute parce que le film ne m’a rien inspiré de visuel. Oui hein. C’est assez frustrant d’ailleurs de sortir de 2h de toile et de n’avoir aucune proposition visuelle, pas le bout d’une extrémité d’une idée. Enfin voilà:
L’équation “aimé le premier film mais être déçu par le deuxième du même réalisateur” se vérifie ici, mais à quel prix. Le pacte du coeur des loups des hommes, c’était bien, un vrai film sentimental pour mecs, trivial et gentil. Mais là, olalalala la chute. Un célibataire endurci tombe amoureux d’une jeune veuve et lui arrange un voyage à Bali. Simple. Règle de base d’une amourette réussie: éviter Dunkerque parce qu’il pourrait pleuvoir et la transporter dans un endroit féerique, totalement coupée de toute réalité sociale et d’éventuels tsunamis tragiques. Après 10 mn, le film va tomber dans la routine suivante: larmes, décors de carte postale de Bali, balade en scooters avec musique à fond dans les ipod, larmes, re-Bali etc. Comme ça pendant tout le film. Les dialogues, particulièrement risibles, n’aident pas à donner une once de crédibilité (toutes les phrases clichés des plans dragues foireux y sont ! Notez les pour faire rire vos copains). Plus faux, tu meurs. La direction d’acteur est simple: “bon toi, tu pleures et tu regardes le vide, lui te regarde avec un air vaporeux. Toi, Daroussin… tu fais rien, profite de tes vacances, mec!”. Quand à Bali, oui effectivement c’est bien joli, mais il ne suffit pas de filmer de belles images de vacances pour bricoler de l’émotion qui finira par sonner très fausse en fin de compte. Le coup de grâce: le happy-end dégoulinant. La beauté du monde n’est certainement pas dans ce film souvent affligeant. Et si vous voulez vraiment de l’exotique, rabattez-vous plutôt sur Lilo & Stich.
zéro dessin, du coup, hop, un feu rouge londonien
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