Cinématographe

U 93

… alias Vol 93 ne fait pas dans la dentelle et ne nous épargne aucun de ces petits effets mélodramatiques, tel ce vieux téléfilm passé sur M6 où l’avion se pétait en 2 « basé sur une histoire réelle ». Et là, le label vu à la TV clignote à plein tube, tentant de faire passer toute l’émotion autour de cet avion détourné devenu mythique. Pas besoin de se creuser la tête, l’entreprise sera forcement réussie au sens hollywoodien du terme. Une histoire avec des gus dont on sait qu’ils sont voués à une mort certaine, ça marche systématiquement. Cette docu fiction puise dans tous les tics crispants et les codes du genre (« oh le gars qui a failli louper son avion, on a mal pour lui ») à l’exception du gars noir sympa et du chien qui arrive à se sauver. Il y a heureusement un allemand un peu lâche à bord pour contrebalancer l’absence de ces clichés. Comprenant le triste sort qui les attend, les pauvres victimes se rebellent contre les preneurs d’otages et font écraser l’avion. Attention, c’est la version officielle retenue depuis le 12 Septembre et depuis, le courageux baroud d’honneur a donné lieu à toute une mythologie (on a même pu le voir en comics !). Loin de moi l’envie de tomber dans les bas-fonds d’un conspirationisme (qui est fondamentalement débile), mais le film est condamné par son essence, à nous offrir une idéologie consensuelle, sans aucune forme de profondeur, d’idée ni de réflexion. Le vide agaçant et crispant. Tout est dans la montée d’adrénaline de « les héros vont mourir », l’effet le plus facile du cosmos. Un sujet en or pour en arriver à un film de rien et la méchante impression d’être pris pour une courgette.

L’illust d’aujourd’hui est une archive de Septembre 2001, donc plutôt à propos, rage & emotion. J’ai l’impression que c’était hier.

Volver


La ligne sensible entre comédie et drame est toujours difficile à tenir, et pourtant Almodovar réussit avec une classe incroyable et un panache unique. Volver est un petit concentré de drame familiaux, de conflits générationnel, de haine voire d’oubli patriarcal, surfant vaguement sur le fantastique, puisant dans toute la cinéphilie de Pedro, avec son cortège de kitsch mais qui retombe sur ces pieds avec une agilité féline. Rien que la première scène est colossale. Penelope Cruz qui soutient en grande partie ce film bâtard est bouleversante, dans son rôle de mère courageuse, étouffant beaucoup de non-dits mais aussi une rage incroyable. Elle est magnifique, que cela soit dans sa peine, son tour de chant, sa manière de se débarrasser d’un cadavre ou de faire la vaisselle. La mort qui plane au dessus de toutes les scènes, celle des hommes, limogés dès les premières minutes, celle des mères solitaires des villages, tout cela n’est qu’un trompe l’œil. Volver, habilement dissimulé par tout un stratagème de réalisateur malin, nous balance de la vie à la gueule, de manière magistrale. Estomaquant de génie.

(illustration expérimentale exceptionnellement disponible en autre chose que du format 2cm sur 3 en cliquant dessus)

Conversations with other women

J’ai du mal avec le titre de Conversations with other women en France. Pourquoi Conversation(s) avec une femme ? Peut-on d’ailleurs avoir plusieurs conversations avec une femme ? Une question quelque peu sans réponse dans ce film puisque c’est l’histoire d’un mec qui retrouve son ex à un mariage. Forcement, ça bavarde. Ah ça oui, verbeux est le mot. Finalement, c’est une comédie sentimentale gentillette, futée et sans doute nettement plus intéressante que toute celle de la filmo de Sandra Bullock. Pas difficile. Les deux acteurs s’en sortent bien (dont l’ex égérie de l’underground Helena Bonham Carter, miss Burton et sans doute la cause directe du ventre mou actuel de son jules).

Ah oui, surtout évitez le premier rang : le film est partagé par un split screen continuellement qui vous filerait la migraine.