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The Fighter
Mar 17th
“The only place I get hurt is out there” nous lançait Randy, les yeux perdus, le catcheur déchu de The Wrestler, en remontant une dernière fois sur le ring. Aronofsky a décidé de franchiser la souffrance humaine du lutteur, caméra au poing. En n’oubliant pas cette morale immortelle propre à Rocky, que rien ne peut te frapper plus fort que la vie. So fucking true.
Cette année, on a déjà eu petite Natalie Portman tuméfiée dans Black Swan, et maintenant Fighter. Sauf que Darren ne fait que le produire, laissant David O.Russel (Huckabees, les rois du désert) s’engouffrer dans une voie quasi documentaire sur la vie de Micky Ward, un boxeur IRL qui s’est fait un parcours balboesque, jusque dans le tissu social.
Evidemment, c’est based on a true story comme 90% des films qui sortent cette année (à part peut-être Thor et Captain America où le doute est permis). Mais c’est peut-être un des films de l’année.
D’accord, il y a Christian Bale, oscarisé, qui dégomme tout en ex-boxeur qui revit toujours le match de sa life mais qui a fini par sombrer dans la came. C’est le Bale show à plein tube, à la frontière de la folie désarticulée et l’Actor’s Studio à l’ancienne, comme s’il était en compet’ avec Daniel Day Lewis dans celui qui plongera le plus profondément dans la psyché de son personnage. Il est génial, il est objectivement foudroyant mais ce n’est pas lui le héros.
Son petit frère, Micky Ward, joué par Mark Wahlberg, vit dans l’ombre de ce grand frère empoisonnant, essayant de boxer comme il peut sur des conseils parfois peu avisés de ce toxico, tout en étant managé par une mère castratrice et une famille étouffante comme seul Clint Eastwood aurait osé nous la montrer. Remember Million Dollar Baby. Seulement, ici, la famille n’est pas parachuté à la fin pour faire un laïus de droite sur ces connards “qui pompent nos allocs” (hé, c’est réac-Clint, hein). La tribu étouffante en pur produit du bidonville riquain nous est ici livrée en pack, dès le début, sans jugement de valeur. Micky va devoir couper les ponts avec ce qui l’empoisonne pour quitter son statut de loser déprimé s’il veut entendre un jour son propre Training Montage.
Il y a dès le début de The Fighter, une scène absolument fantastique. Micky Ward, plusieurs défaites consécutives, toujours effacé, suit son frère dans un bar. Il y rencontre Charlene (Amy Adams, sublime), cette rouquine. Tout le setup du film tiendrait presque dans cette scène. Mais comme dans le récent Jewish Connection, alors que The Fighter passe son temps à lorgner vers le docu, c’est dans une scène de fiction pure que le film devient flamboyant. Ce Mark Wahlberg cristallin qui drague avec ses moyens, avec la boxe comme seul langage, pour essayer de lui faire lâcher son 06, est sans doute une des plus émouvantes séquences de séduction depuis… Rocky 1 quand Sly dodelinait pour amadouer Adrianne, avec juste une inversion des rôles.
The Fighter est long car il prend son temps pour faire monter l’adrénaline. On ne compile pas l’impact et le drama de Rocky 1&2 en une heure et demie. C’est le même combat. Finalement, la morale des films de boxe sera toujours la même. Les héros larger than life de The Fighter n’existent pas pour les coups qu’ils donnent. Au contraire. Pour eux, l’important c’est de savoir encaisser, pour toujours se relever.
Black Swan
Mar 13th
Le méta-commentaire, c’est cool, mais jusqu’à une certaine limite. Et en général, il devient carrément plus agaçant en point final, le pinacle du message lourdingue métatextuel d’autosatisfaction du réalisateur. Le dernier bien gravos dont je me souvienne, c’était Brad Pitt qui te regarde face camera dans Inglorious Basterds pour te dire “I think this just might be my masterpiece“. Et peu importe si tu aimes le film ou pas. Faut une certaine dose de couilles et/ou d’inconscience et/ou de confiance pour se quitter là-dessus (surtout dans ce cas, sur un délire pitché comme “le film de guerre que j’ai toujours rêvé de faire et qui a nécessité 10 ans d’écriture et de réflexion”).
Donc (ce n’est pas un spoil) Black Swan s’achève sur la même autosatisfaction metatextualisé du réalisateur, s’exprimant par son actrice. As-tu été parfaite, Portman, comme tu le dis crânement ? J’ai tellement vu de films où Portman jouait si mal, que l’idée de la voir exister pendant deux heures, de dos, caméra au poing (déjà utilisé dans The Wrestler), lui fait plutôt honneur. Même si cela se voit assez clairement qu’elle n’est pas danseuse pro. C’est un peu le syndrome que j’appelle “le petit chinois de AirBender“. Où ils ont pris un petit babtou, lui ont rasé la tête pour faire plus chinois et lui ont collé un coach de kung fu. Ca peut faire illusion mais pas assez longtemps. Mais sans rire, elle s’est donné du mal, c’est du cinoche et qui fonctionne sans donner l’impression de basculer dans la “brochette fromage” de la danse.
Nathalie, ce n’est pas ton jeu subtil qui t’a rendu célèbre.
Là, Aronofski ne te rend pas service de ce coté là, filmant ta gueule larmoyante camera embarquée comme dans Wrestler (le chef d’œuvre d’Aronofsky, pas reviewé ici par manque de temps mais très haut placé dans mon cœur, un éclair de génie inégalable et improbable après Fountain devenue la matrice de sa dernière production Fighter, review prochaine ici, évidemment). Mais son jeu s’accorde la dichotomie un peu simpliste mais presque habituelle du réa. Déjà, Requiem for a Dream osait aller loin dans les parallèles neuneus. “L’addiction de la came, de la tv, de la bouffe, tu vois, fiston, même combat”. Black Swan a le mauvais gout de cette psychologie pour les nuls qui joue à la shock value. Le blanc, le noir. Le tout avec les miroirs, des tableaux qui bougent de manière ringarde, rien ne nous est épargné en effet kitsch, aucune forme de subtilité. Les plumes qui sortent du dos. La transformation physique. Et puis les petites voix qui chuchotent qui ne sont pas sans rappeler les E.T d’X-Files. Seriously, quoi…
Mais tout ce mélange de Freud pour les noobs est heureusement transcendé par Vincent Cassel dans un rôle fonce-dé, variante du mafieux du génialissime Eastern Promises, où il fantasmait sur Viggo Mortensen. On se moque souvent de Cassel, de son jeu estampillé Rivières Pourpres, mais là, il fait son taf. Regardez un peu son langage corporel, ce mec ne fait jamais rien au hasard. Et puis Mila Kunis, meilleure amie officielle de Google Image, elle est tout simplement… enfin depuis Forgetting Sarah Marshall… elle est intestable.
D’ailleurs, en y repensant, au tout début du film, elle fait une toute petite apparition, flippante, dans le métro. Elle sort une station avant et arrive en retard. Malveillance salope ou erreur consciente, cet instant bizarre et pourtant totalement banal montre à quel point Black Swan aurait mieux fonctionné en restant dans la sobriété plutôt que jouer aux feux d’artifice “m’as-tu-vu” du film schyzo, ce que d’autres (Bug par exemple) faisait beaucoup mieux, en tout point de vue.
Le bon Aronofsky, c’est Fighter, mais on y revient bientôt.
Com-Robot