“L’île” m’avait été vendue par des russes comme un des best movies ever, que j’allais voir ce que j’allais voir, ultra profond et tout. En vérité, sa première qualité a été de sortir au bon moment, tel un tube de l’été bien calibré. Après des décennies de communisme, La Russie est submergé par un mysticisme étrange, qui oscille entre superstition et fanatisme dogmatique. Cette île, c’est le lieu reclus et isolé au nord de la Russie où un jeune marin échoue, laissé pour mort par les nazis. Peiné à mort d’avoir (assez lâchement) laissé crever son supérieur, il rentre dans les ordres dans le monastère de l’île, un endroit de méditation et de bons à rien comme dirait Mélenchon qui a un wikipedia sélectif.

Commence alors un chemin de croix qui va occuper sa vie entière, et où son zèle et son entêtement vont vite faire peur à ses collègues barbus (oui, les extrémistes sont toujours barbus, c’est comme ça…) Dans ce film volontairement lent s’agite un petit monde de croyants, chacun suivant sa voie et sa foi à sa propre manière, de préférence celle du « héros » de l’histoire. Car c’est le problème : ce que le spectateur lambda retiendra en mysticisme (et ça, y’en a un paquet), c’est autant de manifeste zélé pour les croyants. Attention, on est loin de la bêtise de la Passion de Gibson qui était loin d’être infinitésimale. Si l’on s’arrête au point de vue strictement moral avec en arrière plan, le boom mystico-religieux de la Russie, le fait de voir le plus zélé devenir l’apôtre de la bonne religiosité, tel un Eric Zemmour défendant son mono-modèle de pensée sur fond d’argumentation victimo-réac’, laisse un arrière goût désagréable dans la bouche. Tout le reste (et vraiment tout : acteurs, réa, narration, cadrage assez fou) est dans la droite ligne de ce qu’on aime voir chez les héritiers de Tarkovski.