Indy fait partie de ces trilogies intouchables des années 80. Indiana Jones était jusqu’à présent un projet socialiste, conçu et décédé sous le double mandat de Mitterrand. Il fallait donc adapter la recette à un monde plus libéral, avec plus de figurines. Aujourd’hui, Indiana Jones est aussi une collection de Lego, il faut s’y faire. Le film qui nous arrive dans un état un peu pathétique aujourd’hui a, facile, 10 ans de trop, si ce n’est pas 15. Après cette gestation maousse, on est en droit d’attendre une vraie histoire et un script mitonné aux petits oignons. Seulement voilà, Old Indy est en fait le porte-voix d’Old Lucas et d’Old Spielberg, eux aussi de jeunes aventuriers qui se sont encroutés. Pourtant la première demi-heure commençait vraiment bien. Situation, problématique de la guerre froide caricaturée à l’extrême, communistes (à défaut de méchants tout droit issus de la nazisplotation), vannes de septuagénaires (« I’m for Ike », c’était le slogan que mon père beuglait quand il a fait la campagne d’Eisenhower-mais il était rétribué- c’est vous dire la fraicheur de la vanne), ça fonctionne en trainant le pied, comme un Woody Allen qui voudrait faire les mêmes petits effets qu’avant. Tout l’écriture du film s’est concentré sur cette intro. Et puis, blamn un frigo le protège de quoi, 10 millions celsius causée par une explosion nucléaire full blast, et là c’est le drame. L’Indy transgénique nous apparait dans toute sa vérité.

Tout en n’échappant pas aux clins d’œil appuyés aux précédents volets d’une lourdeur inouïe (la tentative désespérée de faire croire que les photos de famille sur son bureau sont là de manière naturelle), on récupère Shia Labeouf en croisement de cosplay Marlon Brando jeune et de Besancenot. Lui, bizarrement, n’est même pas le pire et apporte un cachet sidekick indispensable, comme le Bucky de Captain America, il existe pour faire bouclier de son corps et empêcher les tartes à la crème de toucher le héros. Un relou indispensable à qui on ne jetterait pas la première pierre s’il n’avait pas décidé de jouer aussi à Tarzan, dans une jungle en images de synthèse, sautant de liane en liane avec des putains de singes CG. Mais bon, le forfait Indy inclut son pack de Shia, t’as pas le choix.

Cette stratégie comique de serial tombe vite à l’eau car Indiana Jones ne devient qu’un simple spectateur, guidé par une histoire GPS qui n’a même pas besoin de lui. C’est comme si on passait en mode jeu d’aventure avec Walkthrough activé, la soluce/FAQ sur les genoux. Fourmis rouges, rouges cocos, Yamakazi aztèques, extra-terrestres, Jean-Michel Apathie, on ne nous épargne aucun danger alors que Indy reste tragiquement impuissant, guidé qu’il est par un savant autiste. Même pris dans les sables mouvants, il n’arrivera pas à se sauver lui-même. Un final type Spielberg, « l’enfant du rêve, les ET qui s’en vont » et paf, la bérézina. C’est la fin de l’enfance pour Indiana. Old Indy ne fait RIEN. Dépourvu de tout enjeu, de toute tension (sans doute la faute aux nazis, remplacés par des communistes de base), Lucas et Spielou ont réussi à rendre Indiana transparent, devenant littéralement un sidekick de lui-même. La vieillesse lui va moins bien qu’à Old Snake.

Donc reset mémoire, on l’oublie et on se console avec le vrai Indy IV, le seul qui compte :

Bref un seul sur 5.

Et forcément