Prometheus occupe d’emblée un créneau très spécifique dans le monde du blockbuster, celui au mysticisme exacerbé. “Pourquoi la mort ?  Pourquoi les robots ? Et qui sont les dieux créateurs de toute vie ?” Et d’aventure, si le grand public se fait chier avec toutes ces considérations, Ridley Scott lâche la badasserie qu’il faut: Idris Elba avec un putain de lance-flammes. Le doudou transitionnel dont j’ai besoin.

Et on ne voit pas assez de choses aussi bien qu’un Idris Elba au cinéma, le seul noir suffisamment classe pour jouer avec brio un dieu asgardien.

Prometheus est à Alien ce que l’iPod est au walkman, une version “streamliné” du même sujet, avec une touche de Blade Runner. Mais il faut voir ce design massif, suprême, presque stalinien des vaisseaux, de la grotte. Ouais, une grotte, un vaisseau et c’est tout, un vrai hui-clos qui n’est pas sans rappeler le passage du “hatch” de Lost. Ce n’est pas un hasard, c’est la touche Lindelof, co-showrunner de Lost, co-auteur de Prometheus. Mais tous ces mystères, ces bas-reliefs sur les murs qui n’ont finalement pas tant d’importance. En fait, a-t-on vraiment besoin de ces films “Special Origin”, de savoir tout ça, de lever toutes les parts d’ombre comme pour La Planète des Macaques, l’année dernière ? Je crois que je me fiche complètement de savoir pourquoi il y a des bestioles dans l’espace aussi surement que de savoir à quel moment l’intellect des singes a surpassé celui de Morandini.

Ridley avait clairement autre chose en tête qu’une bête genèse mais en profite pour revenir à sa spécialité. Du pur Ridley des années 80 qui, 20 ans avant Buffy, imposait l’image d’une femme ultra-forte. Dans Prometheus, son héroïne fait front ce qui permet d’inclure une de ses scènes les plus incroyables depuis Alien, avec une fantastique Noomi Rapace qui tabasse, quand le reste de l’équipage fait de la figuration dans la grande tradition du space survival .

Ridley, j’adore le répéter, a 75 ans au compteur. Son style, c’est “directeur d’acteur” alors qu’il passe son temps avec des films avec de grands espaces, de l’héroïsme féministe ou au contraire turbo-viril. Prometheus, c’est un blockbuster où il ne se passe pas vraiment grand chose, où les mecs scrutent de vieilles inscriptions sur les murs et où Fassbender joue un robot intrigant mais tout habillé (son meilleur rôle). Ridley est vieux. Il a un bout de métal dans sa jambe. Il a déjà produit un des plus beaux films de l’année. Je crois que j’aime Ridley parce qu’il nous rappelle qu’on peut toujours créer quelque chose de pertinent à un âge où d’autres ne sont obnubilés que par leur prostate. Le père awesome qu’on n’a jamais eu.