Un doc sur la télé, au ciné. Mouif, et puis de toute manière Pierre Carles l’a déjà fait. On pourrait hausser les épaules et se dire qu’on n’y apprendra rien. Ce serait oublier le plaisir primal qu’on avait à regarder entre amis (ou entres MSN) le show de Bataille et Fontaine. Le rideau. Daphné. Sam, le mec muet qui montre où est le bout du couloir. Le cynisme de la mise en place. L’exemple même du « plus c’est nul, mieux c’est ». J’y prenais plaisir en bruit de fond en bossant. Le highlight, c’était les speechs. « Mais la joie a quitté Yolande. Désormais, elle n’a plus que des souvenirs qui sont autant de photos jaunies par l’indolence des sentiments amoureux (…) ». Yolande a décidé de revoir Jean-Charles son amour de vacances du club Mickey d’il y a 15 ans. La télé le retrouve. La télé lui donne une invit’. La télé paye le Novotel à tout le monde en attendant l’enregistrement de l’émission. Enfin la télé offre le plaisir vicelard à des millions de spectateurs de voir la jeune fille se prendre un méga-vent.

Dans cette boite de prod type (avec une armada de jolies filles, plus concentrées et sexy que dans un film de sexploitation), les boss passent, débriefent en short, balancent des skuds de bon sens populo (On apprend donc qu’une des conditions d’audience est « pas de sujet d’homo à l’antenne juste après la Toussain »). Le petit et le grand restent assez cohérents, on en est presque déçu. Ils font leur taf, un peu de loin, en essayant de rester cool malgré les gueulantes. Mais déjà, on sent qu’ils en ont marre. La star de cet insider est le rédacteur en chef de l’émission, portrait craché de Montgomery Burns (gnééé). Mi-Alexandre Dumas, mi-Kagemusha, il écrit les fameux speechs sirupeux de fou et balance des vérités sur la vie, qu’elle soit de plateau ou pas. Scène de fou : il passe des heures entières à convaincre un témoin de venir sur le plateau… Sauf que ses jolies stagiaires gloussent avant la fin de la longue conversation téléphonique : en fait, il y a erreur sur la personne. Que ce soit de Yalta à la Tecktonik en passant par Mai 68, tout devait amener à ces « 20 minutes de bonheur ». On est partagé devant autant de puissance, d’éclairs incroyables, ce génie du mal, dans toute sa radicalité et son cynisme. Je crois qu’aucun être humain à ce jour ne m’a jamais autant fait penser à un super-vilain de comics. Il est incroyable. Il est le nemesis anonyme le plus réussi depuis l’allemand méga balaize qui filait une rouste à Indy dans l’Arche Perdue.

Remember. Ja !

Le doc ne nous apprend rien, mais il est éloquent comme un Strip Tease tourné dans les coulisses de la TV. Il nous aide encore plus à regarder TF1 avec les yeux d’Arte. Sensible et puissant, sans doute le meilleur doc autour du sujet, très loin devant les trucs un peu lèches qui existent encore genre + Clair ou carrément pathétique comme la galaxie Morandini.