Mann, éblouis-nous. Un slogan répété sans cesse depuis que je vois les affiches de sa prochaine croûte, un Shin Miami Vice, série mythique des années 80 où il a fait ses premières armes. Mais maintenant, le père Mann, il est devenu auteur, il tourne en HD et veut bien faire comprendre qu’il est le meilleur pour filmer la nuit. Fini donc les années 80, le babibel, la belle des champs, les Cités d’Or, Phil Collins et les Karaté Kid, téléportation dans notre dure réalité. La drogue, c’est mal, le maïs est transgénique, les gens sont tristes et Phil Collins ne fait plus que de la daube. Le réveil est rude. Du coup, Billy & Jimmy (on les appellera comme ça) n’ont rien à voir avec les flics rigolards de nos souvenirs. Ils tirent la gueule, jamais une parole, pas un clin d’œil, même pas une vanne sur la cravate de son partenaire. Sinistrose d’ un film de Kitano. Mann leur a confié les reines de l’acting, l’air de dire « faites votre daube, moi je réalise ». Et c’est ce qu’il fait, démarrant direct par la boîte de nuit, séquence obligé de n’importe quel Hollywood Night ou des Dessous de Palm Beach, qui n’ont fait que repomper les codes. La modernité n’est pas poussée à l’extrême puisqu’on a droit à des petits clins d’œil à ces années fantômes, grâce à des scènes de cul pathétiquement délicieuses. Le scénario est un peu à leur image, inconsistante voire inappropriée. Il y a des trous scénaristiques dans lesquels on pourrait engouffrer tout le stade de France, des trucs vraiment grotesques, et des questions qui vous tarauderont l’esprit. La présence de Gong Li, qui est pourtant (avis perso) un cadeau de Dieu aux hommes, est ici risible, la caméra allant presque jusqu’à l’insulter. Bon dieu, Gong Li, une secrétaire d’un caïd de la drogue cubain… Soit c’est un pari, soit Michael Mann rêvait de tourner avec elle, tendance fanboy. Pareil pour Colin Farell, quand même assimilable à un beau gosse (non ?) qui est ici enlaidi de manière cruelle, filmé dans sa virilité moche la plus cash. Alors c’est sûr, si on s’intéresse aux conditions de réalisations et de « santé » de son acteur principal, on peut facilement comprendre que son cabotinage éthylique horripile son partenaire Jamie « Melon » Foxx, mais cela ne rend ce film que plus agréable. Oui, car malgré toutes ces incohérences, le maniérisme poseur de Mann s’exprime, rendant sublime le regard perdu de veau mort de Farell se posant sur l’océan, perdu lui-même dans l’indigence du scénario, une manière supplémentaire de dire « même avec ces boulets, cette histoire sans queue ni tête, je suis le seigneur du château. Tel Rocky IV aujourd’hui, Miami Vice sera célébré par les altercinéphiles dans les 20 prochaines années. Crâneur, stylisé, ébouriffant.