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Outrage
Dec 3rd
A Kitano flick. Enfin ! J’utilise souvent la catégorie “ils font des films alors qu’ils ont été au summum” pour définir les films “post-chef d’œuvre”. Mais en fait, je l’ai crée en pensant très fort à Kitano (et un peu à Miyazaki). Après le paroxysme, il y a tellement de réa qui continuent à filmer nawak pour se rappeler qu’ils le peuvent, mais cela n’a jamais été aussi vrai que pour Kitano. Dans les 90’s, ce mec avait été littéralement frappé par la grâce. Pendant quelques années, il a été en ascension exponentielle, progressant à chaque fois comme l’on taille sa propre statue stalinienne de son mythe dans la roche, pour aboutir à son chef d’œuvre. (Hanabi, hein, qu’il n’y ait aucun doute là dessus). Pendant un temps donné de l’histoire du monde, il a été comme Wolverine, le meilleur dans ce qu’il fait.
J’aime la violence au cinéma. Pas toutes. Ma violence préférée, depuis 10 ans, c’est la Corée qui en est devenu le trend-setter comme on dit chez les pubards. J’aime celle de Bong Joon-ho, sa violence ordinaire qui éclate si soudainement. Intrigué, j’ai même été en Corée pour voir d’où ça venait, pour voir si des mecs n’allaient pas faire des coups de pied sautés pieds joints pour des histoires de parcmètres. Pas vu. 10 ans, c’est le temps qui a passé sans que Kitano ne nous donne ce qu’on aime le plus chez lui, cette violence si prévisible, si brute de décoffrage, si “patate”. Outrage marque un retour aux sources et quand le personnage de Beat Takeshi te dit de sortir la langue, don’t.
Outrage est génial car il ne balance aucun cliché pénible tout en restant un film de genre. Scénario anecdotique (chacun cherche son chat chez les yakuza, un premier outrage fait boule de neige et chacun y va de son règlement de compte, de ses excuses, de son petit assassinat). Mais le plus intéressant (et ça fait très longtemps qu’on n’a pas vu ça chez Kitano), c’est un sens de l’espace, des profondeurs de champ fantastiques sur des côtes nippones avec la mélancolie d’un bidonville. Faut les voir, ces plages en étendues grises et vides qu’on ne voit jamais, ces petits quartiers semi-intéressants dont on devine la seule gaité, un combini ouvert jusqu’à 22h. Pendant ces 10 ans à filmer son nombril, Kitano avait surement un lecteur de DVD avec quelques films coréens, c’est certain. Ça l’a inspiré. L’autre truc génial, chez Kitano, c’est l’acting top notch, surtout quand on le compare à l’habituel Japan actor’s studio. En plus de Kitano (qui joue comme d’hab) il y a une crapule absolument maléfique qui a la gueule de Shigeru Miyamoto en plus jeune, un régal.
Sur fond d’humour désespérément noir (avec des exécutions d’un sadisme inouï à reproduire en soirée), on apprend que trancher son doigt est désormais ringard chez les yak. En 2010, Kitano a téléchargé la dernière mise à jour de son système pour redevenir le meilleur des peintres des yakuza. Sans déconner, Ryû ga Gotoku à côté, c’est les bisounours en Armani. Quelque part à filmer des petits offices ringards, ses villas tristouilles de yakuza embourgeoisés, Kitano, sans même envisager d’affronter sa propre légende, s’accepte à nouveau. Ca m’a fait vraiment plaisir de le revoir à ce niveau. Mais peut-être que je ne suis qu’un fan-boy du siècle dernier.

Achille et la Tortue, une rencontre Kitano-Denisot
May 19th
Rencontre imaginaire. Denisot reçoit Kitano. Le plateau de la “Croisette” est chauffé à blanc. Les 70 assistants de Kitano, entre managers et gardes du corps, toujours avec des têtes de Yak’, surveillent le public. Les filles se sont arrêtés de gueuler, Jude Law est déjà loin.
Michel Denisot : - Alors monsieur Kitano, ça fait quoi d’être un dieuvivant dans votre pays ?
On notera que quand les acteurs sont français ou américains, ils ont droit à un “undesplusbeauxcastingsdelacroisette”, répété d’une voix robotique. Là, il est japonais, c’est donc un dieuvivant et le level au dessous, c’est unestardansvotrepays
Rire gêné, Kitano ne répond pas et sourit.
MD: – Ca vous fait quoi d’être à Cannes ?” demande Denisot avec la conviction d’un parrain de la Cosa Nostra.
Kitano : - Annoo. Cannestenowa masa ni Et bien en fait Cannes eigateki no ichiban c’est vraiment pour le cinéma seikai no ichiban l’endroit le plus taisetsu tokoro desu ne important du monde. Et c’est pourquoi je suis heureux d’être ici.
MD: – Alors on va regarder votre montrée des marches d’il y a trente minutes.
Laurent Weil : “Oui, Alors je vois l’équipe du dernier Kitano qui s’approche, je vais essayer de leur parler. HELLO MISTER KITANO. VERY NICE TO SEE YOU AT DE FESTIVAL. DO YOU ENJOY CANNES ?
Kitano : - ummm. Kochira Koso.” dit-il en s’esquivant bien vite.
Laurent: Oui, visiblement, Takeshi Kitano est très ému de monter les marches de Cannes. Il faut savoir que c’est une star internationale qui rencontre un énorme succès à l’étranger, mais aussi que c’est une grande star du comique dans son propre pays.
Retour plateau.
MD: Merci Laurent, tout de suite la météo, le zapping et après Omar et Fred, le petit journal People.
Jingle.
Ce que Canal + a oublié de préciser, c’est que Kitano a déjà sorti un film cette année. Achille et la Tortue est le dernier volet de son égo-triptyque. Ça parle de lui, de ses inspi’ et de sa notoriété de gugusman au Japon. Je ne sais pas dans quelle mesure Hanabi ne parlait pas plus de son fort intérieur, mais là, le thème, c’est sa pomme-LOL. Le film commence par un mini dessin animé qui donne tout de suite le ton de la fable. Machisu (gag) est un peintre mais de deuxième, limite troisième zone qu’on va voir vieillir en 3 époques différentes. Hypnotisé par sa propre œuvre, il s’entête et continue inlassablement, même si aucune de ces croutes ne se trouve preneur. Grotesque, too much et finalement très humain, il est quand même aidé avec passion par sa femme tandis que sa fille le conchie. Trop la loose. En France, ce même setup ferait un très bon combo deConfessions Intimes du genre “Amateur de Tuning, mon père aime Johnny jusqu’à s’en tatouer le corps entier mais ses enfants ne le supportent plus.” Kitano a l’élégance de ne pas nous sortir les histoires archi-vues genre “je suis un génie que personne ne comprend”. Prise de risque pas gigantesque, de la folie répétitive, on est dans le Kitano 3.0, de la fable assez consciente d’elle-même, qui exige quand même d’être assez imperméable au grotesque pour voir un Kitano radical faire son gaga. Oh et le trailer trompeur donne envie de noyer des lapins tellement il est nul.
Blood & Bones
Sep 13th
Dans la collection film glauque, Blood & Bones aurait décroché la pole position s’il ne sombrait pas dans un déluge affreux de violence. Tout repose en fait sur les épaules d’un acteur ô combien charismatique, Takeshi Kitano, dans le rôle d’un coréen qui part vivre au Japon il y a une bonne soixantaine d’année. Et pendant tout le film, il se donnera toutes les peines du monde à se montrer odieux. Dès sa première scène, il viole sa femme. Ce n’est que le début car pas mal d’autres suivront. Ils les tabassent aussi. Ses gosses aussi. Et puis d’autres gens. Il est ignoble avec ses employés aussi. La totale de la panoplie de raclure de bidet. Les bastons sont incroyablement violentes, pas dans le sens Ong Bakien du terme mais simplement parce que les coups sont portés, sans retenue. Assez inouï dans le genre. Ca n’a pas l’air d’être du cinéma tellement c’est réalisé cash et plein cadre. C’est justement là que ça cloche. La puissance de l’évocation, ne serait-ce que pour les viols, est bien plus puissantes que ces scènes affreuses répétés à chaque fois, façon Irréversible. Blood & Bones est un peu un Frères (ou plutôt le père) Karmasov sans but, sans réel propos si ce n’est sa violence caricaturale assommante, la saga d’un mec haïssable dont la vie traverse une des période politiquement les plus troubles de l’histoire du Japon.
(le layout de l’illustration (A4) m’est venue dans le metro, puis l’idée d’appliquer les couleurs directement dessus, sans changer, a fait son chemin entre deux stations)
Com-Robot