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12

Quand on prononce le nom de Mikhalkov, les russes montrent les dents. Certains lui crachent à la gueule pour sa vie d’enfant doré du régime du parti. D’autres lui reprochent sa vie d’après, celle du grand administrateur de la société de cinéma russe. Tous, du moins en occident, ne voyons pas d’un bon œil son pro-Poutinisme, tout comme ses prises de positions pro-serbes bizarres (qui sont de très loin l’opinion majoritaire en Russie en ce moment). Tout indiquerait que Mikhalkov est un mec assez repoussant politiquement, le genre avec qui on ne parlera pas à table de Kosovo, de Tchétchénie ni de reconstruction du PS. Mais sa filmo parle pour lui : Urga, Soleil trompeur, etc, du film panthéiste et méditatif à la Kurosawa, une filiation clairement visible au fur et à mesure des années. Du coup, malgré la qualité de son œuvre, on a un gout amer dans la bouche. 10 ans ont passé depuis le Barbier de Sibérie. Après quelques rôles (dans Zhmurki*), il revient à la réalisation dans 12. 12 comme dans Twelve Angry Men, le classique de Sidney Lumet.

Douze, c’est le jury réunit pour décider du sort d’un jeune tchétchène, accusé du meurtre de son père adoptif, un militaire russe. Forcément, c’est l’assassin idéal. Et puis il y a le témoignage accablant d’un témoin, les preuves, le mobile du crime est tout trouvé, bref, c’est plié. Sauf pour une personne qui émet un doute. Le vote se faisant à l’unanimité, il exposera son point de vue, et fera hésiter alors chacun des jurés, jusqu’à ce que toute la salle soit submergée par le doute.

La société russe est assez complexe de part ses années de traumatismes postcommunistes (on le serait à moins) mais aussi son multiculturalisme. Alors que la société japonais, par exemple, est soudée par son réseau ferroviaire qui ripoline les citoyens, les hommes russes ont tous en commun l’armée. Chacun a servi dans l’armée ou a eu des proches impliqués dans un des nombreux conflits de ses cinquante années. Le jury est lui-même assez complexe. Entre le vieux chauffeur de taxi usé à la gueule de Lee Marvin soviétique, l’ashkénaze futé et rigolo à la calvitie prononcé, le chirurgien du Caucase, le bourge parvenu de la TV, le nez plein de coke, qu’il faut voir comme un Delarue avec du bide, l’orthodoxe bien prononcé jusqu’à Mikhalkov lui-même qui préside le jury, le spectre est large. Chacun de ces mecs, malgré des certitudes très viriles (ce n’est que des hommes by the way) a une faille. Chacun aura, à un moment, une raison de douter ou d’orienter son vote vers une direction. On assiste à un tour de force d’acteur, chacun touchant à une corde particulière de la conscience des onze autres, et de nous, les spectateurs, révélant parfois des êtres totalement différents de ce qu’ils émanent, le tout dans un huit-clôt tout aussi oppressant que théâtral. Mikhalkov nous présente des vieux chiens abimés par la Russie. Mais pas de corrompus parmi eux… Contrairement au tchétchène plein de panache qui entame sa danse du couteau flamboyante dans sa cellule, ces jurés ne sont pas beaux, ils ont les mains calleuses à trop travailler. Ils perdent leurs cheveux et ont du bide. Ils n’ont pas le beau rôle et pourtant ils vont décider de la vie du môme. Une vraie tradition Dostoïevskienne se perpétue ici.



12 Trailer

12 est absolument splendide. Il est en plus un film très moral, dont les tenants et les aboutissants sont peut-être aux antipodes de ce qu’on pourrait attendre du Nu Mikhalkov dont les extraits écrits et youtubisés font méga peur. En faisant abstraction totale du mec et en ne prenant le film que pour ce qu’il est (ce qui est assez compliqué quand on sait que Poutine a kiffé le film, ouais hein), on vibre à fond pour ses quelques moments totalement Airwolf. Un vrai grand film politique, objectivement généreux et donc dérangeant.

(ah et encore une fois, pas de sortie programmée en France, merci les mecs…)

  • Copy paste de ce que j’en disais à l’époque: 2 mafiosos dans l’ère post-perestroïka galèrent pour des histoires de came à ramener à leur patron (Mikhalkov justement, sous coke et déguisé en Michou/Pascal Sevran, ce qui paraît-il était très hype il y a 10 ans). C’est grosso modo un Reservoir Dogs slave, assez violent mais toujours très comique, reposant quasi exclusivement sur ses acteurs qui font virevolter les répliques racistes, bêtes et méchantes. Bien reconstituée, la Russie d’alors est un mélange entre Desperado et Mad Max, un monde semi-anar’. Zhmurki propose une vraie vision ironique d’un moment de l’histoire d’un pays déboussolé, partagé entre son envie de rebondir et de presser le citron tant qu’il est encore temps.

Appaloosa

Appaloosa est un exemple typique de film canonique, ricain dans toute sa splendeur et sa largeur 16/9ème. Un western en 2008, c’est un anachronisme, certes, mais quand il va plus loin sans se poser de question, là, c’est un miracle. Je n’ai rien contre les beaux morceaux de cowboys panthéistes et dépressifs façon Jesse James ou in extenso Brokeback Mountain. Au contraire. Mais un vrai film du genre, qui s’accroche fermement à ses codes sans diffuser de méta-messages, c’est comme un peu de chaleur que vient vous mettre dans le corps le 5ème shot de vodka : on est bien, en territoire ami. Open Range avait un peu amorcé le retour et Yuma² refaisait du déjà fait en moins bien. Là, on monte le level.

Appaloosa, histoire type datant de la conquête de l’Ouest. Petite bourgade préindustrielle, elle est victime de Bragg, un bag guy (Jeremy Irons, brillant), margoulin de première et accessoirement assassin. Les pontes du bled finissent par demander de l’aide au marshal Cole (Ed Harris, qui réalise aussi) et à son adjoint Hitch (Viggo Mortensen). Histoire de l’affrontement classique de la droiture face au mal, qui se morphe finalement en corruption, avec un vague fond amoureux (Zellweger, no comment).

Ed Harris qui avait réalisé le brillant Pollock (sélectionné dans mon futur article « les bons biopics qui se la pètent pas, sans morceaux d’acteurs dedans », revenez quand ça sera prêt) fait ici du Western Grand Espace qui respire le Nouveau Mexique, de la chaleur à la poussière. Mais surtout, il capte complètement l’essence du buddy movie sérieux et viril, l’harmonie des hommes qui regardent dans la même direction, en se comprenant sans se parler. C’est vraiment dur de capter « ce truc », cet équilibre qui fait que l’entreprise peut basculer dans la bouffonnerie. La réa, énergique mais tout en contrôle, donne la distance suffisante qui évite le trop sérieux, pesant et poussif façon Dark Knight (qui, au fond, essayait de développer la même thématique, à savoir cette amitié doublée d’une bonne dose de bushidô). Ed Harris, génial dans son rôle de « mec à couilles qui te regarde avec des yeux de tigres » (cf la filmo de Clint Eastwood) est secondé par un Viggo époustouflant. Aah Viggo. Véritable pinceau humain qui n’a jamais été aussi bon que depuis qu’il a fait oublier le Seigneur des Anneaux de son palmarès, il est manipulé par les réalisateurs à qui il fait littéralement don de lui-même. On pense aux deux Chronenberg et (Inch’Allah) au projet Poe de Stallone. Ajoutons à ce casting parfait la gueule de voyageur décalqué de Lance Henriksen, et on a de l’or en barre.

Appaloosa ne déçoit pas, jusque dans son finish, d’une majesté contenue. Seule anicroche au genre : c’est le refus total de tout folklore et de paillettes. Le passage des « indiens » concentre toute l’humanité de Danse avec les loups en 5 minutes tandis que les guerriers du Far West tombent minables sous le coup des balles. Pas de de blessures viriles au bras gauche (celui qui ne sert pas, pour pouvoir tuer le boss de la ville/de fin de niveau) après les fusillades. Les duels tiennent plus de l’intensité du combat de samouraïs, affuté comme une lame. Ce réalisme, qui va jusqu’à la pousscaille qui s’installe dans les cicatrices des gueules bourrues de ses héros qui vivent leur derniers moments de vie façon Bakumatsu, apparait comme une vraie force tranquille. Le traitement intelligent et harmonieux de cette amitié burinée, fruit d’un amour évident du genre, tout cela fait du film d’Ed Harris, une sorte de « template », de moule à gâteau dans lequel les autres devraient se fondre. C’est, en quelque sorte, ce que le cinéma américain produit de meilleur aujourd’hui : une œuvre néo-classique.

Captain America

Le comics que tu dois lire.

Je dois avoir 34 différents brouillons word, réparti entre PC différents, mac et clefs usb de merde qu’on paume tout le temps, consacrés au travail de Brubaker sur Captain America. Même des idées mailé à soi-même pour ne pas oublier. En épluchant les multiples bafouilles, une conclusion : Captain America, tel qu’il est aujourd’hui, est devenu ce que devrait être un comics de super héros pour adultes, un genre lisible même par ceux qui détestent le genre ou le mec en question. Pourtant il n’emprunte pas le chemin de Watchmen qui caresse son lecteur dans le sens du poil en lui faisant croire qu’il a découvert le radium à chaque page tournée. Captain America 2008 est plus viscéral. Mais je peux comprendre une certaine appréhension.

Soyons franc, pour plein de gens, Captain America n’est pas très ragoutant. Vous aimez les connards qui sortent les drapeaux de leur pays aux J.O pour faire un tour d’honneur ? (tips : moi pas) Captain America, lui, il le porte son étendard, avec une belle étoile sur la gueule. Et un A sur le front. Pour beaucoup de gens, ça fait tié-pi, ça rappellera les comics de propagande des années 40,50. Pourtant, un Cap bien écrit, c’est tout sauf ça. Il y a l’anti-américanisme primaire qui ronge pas mal de gens, et qui voient derrière le perso, comme une forme d’activisme bidon, un peu comme si un des enfants Sarkozy se retrouvait aux commandes d’un robot géant pour protéger Paris et sa très proche banlieue ouest. Totally pas cool. Dans le même ordre d’idée, on ne pourra jamais empêcher les cons de croire que « Born in the USA » de Springsteen est un chant patriotique. D’autres gens arrivés plus sur le tard en comics n’ont en référence que le Captain d’Ultimates, celui qui passe un de ses super potes au Kärcher de flamme. Uncool. Ca peut faire marrer, genre « ha-nelson.gif », mais moi, pas des masses. Ce n’est pas du bon Cap, c’est du fanfic. D’ailleurs le Cap dont je vais vous parler s’autorise des coups de pieds dans le cul mémoriels qui montrent bien qui est dans le vrai. Bref, Cap, si vous ne le connaissez pas, c’est tout l’inverse de ce que vous pouvez en penser au naturel. Ca va devenir vrai dans ce texte, t’entends.

Quelques runs intéressants so far : Kirby & Joe Simon, forcément c’était les premiers, mais bon pour moi the true début sera toujours Kirby. Il y a le très court run un peu espionnage « in your face » de Steranko qui sert beaucoup au Cap de Brubaker. Les années 80 furent marqués par le boulot bref mais exceptionnel de Roger Stern et Byrne, redéfinissant complètement le personnage, ses loyautés, tout en le respectant à 100%. Mark Waid, beaucoup plus tard, écrivit des histoires qu’on qualifierait « d’inspiring ». Il rentre en conflit direct avec l’autorité, le Président etc. Mais s’autorisait des bastons contre Kang, le dictateur spatiotemporel. Même si des crises reviennent fréquemment, on n’avait jamais vu autant Cap contre ses « chefs ». Enfin, il eut pas mal de moments « fuck yeah » en tant que membre et leader des Avengers, trop nombreux pour les citer. Quoique, John Buscema, ça dépoutrait…

Le Cap d’aujourd’hui nous apparait après des années de perdition rédactionnelle. Il s’est démasqué tout seul (après tout, tous ses proches et amis sont morts de vieillesse, plus personne ne risque de dommages collatéraux). Mais il lui manquait des histoires edgy. C’est là que rentre en scène The Bru. Ed Brubaker. Pendant des années, le gus a été celui qui injectait des doses de polar dans ce qu’il touche. Gotham, les trucs indy avec des commissariats enfumés, tout sauf X-men. C’était le mister fixit, utilisant tout ce qui est sale, moche et peu appétissant. Evidemment, quand un mec aussi doué, touche à tout comme lui, se prendre des murs reste possible. Xmen Deadly Genesis était nullache tandis que ses X-Men tout court sont tout sauf impressionnant. Mais mais mais, il est multitâche : il a rendu vie à Iron Fist de manière cool (un blond qui fait du kung fu) et surtout, il a pondu Criminal entre temps, sans doute ce qui s’est fait de mieux dans le genre polar-bédé depuis très longtemps. Les personnages sont tous esquintés, usés par la came, les meurtres, la mafia. Pickpocket, gangsters, putes et maquereaux, tout passe à la moulinette du marasme urbain dans lequel ils sont plongés. Quand un mec se prend une bastos, ce n’est pas un héros, il rampe et c’est moche. A côté Sin City ressemble au « pitre au pensionnat ».Peu d’espoir dans ce microcosme de racailles contre flicaille contre racaille, on est dans le jardin du Bru. Mais quel est le rapport avec Cap ?

La première chose que fait Bru en prenant les rênes du comics, c’est de re-densifier Steve « Cap » Rogers et tous les personnages secondaires. Fan favorite Nick Fury, The Falcon, ils gagnent tous en épaisseur. Steve retrouve Sharon Carter, son amour in & out, on & off et il casual-sex même avec elle, comme si de rien n’était. Mais est-ce que c’est ça qui fait que ce Cap est un comics pour adulte ? Bah non. Bru fait son job et réunit de nombreux éléments, parfois totalement éculés et archi vus. Ils les poussent jusqu’au bout de leur système. C’est lui qui a foutu Matt Murdock en prison, après tout (arc culte).

Sa première grosse initiative, c’est de ramener Bucky à la vie. Comme la plupart des héros nés avant les années 80, Cap a eu son sidekick à lui, son poto adolescent qui servait aux plus jeunes à s’identifier et à faire des blagues malgré les sauts d’obstacles continuels dans les tranchées nazi. Il sert aussi à ceux qui se croient plus malin à disserter sur l’homosexualité sous-jacente, façon Batman-Robin. Ce qui est ridicule, mais permet de faire croire qu’o n a un cynisme pop culturel très fin, pour briller lors des conventions et des conversations dans les boutiques de comics.

Bucky (James Barnes en fait) était apparemment mort dans une explosion qui d’ailleurs a propulsé Cap dans un glacier où il est resté en animation suspendue jusque dans les années 60. Bon, d’un point de vue de fan (et je m’incorpore dedans), c’est un des moments fondateur de la vie de Cap moderne, son « oncle Ben » à lui. Il perd son partenaire, ca le balance dans l’eau froide pour 20, c’est quand même un acte important, au moins autant que l’appel de Cochin de Jacques Chirac. Le problème, c’est que ce n’est jamais vraiment arrivé. C’est un retcon, vendu à chaque fois en flashbacks traumatisants. C’est un point de mythe ajouté post-factum pour faire le lien entre les deux périodes. C’est l’argument utilisé par Bru pour remanier ça et le réécrire de manière intéressante.

So Bucky est vivant, il a survécu malgré la perte d’un bras (ce qui en comics se traduit par un bras bionique). Il a été brainwashé en Union Soviétique avec des marches staliniennes, entrainé par le coach de Laure Manaudou, tout en écoutant des discours de Marie-Georges Buffet. Même un soldat comme Bucky ne put résister à la reprogrammation. Il est devenu le Winter Soldier (fantastique nom de code, s’il en est), résolu de tuer Cap et tout son supporting cast un peu nul de ces dernières années tel que Nomad. Qui en a quelque chose à faire de Nomad, au fait, qui ? Qui se souvient qu’il a eu sa série à lui tout seul ? Enfin voilà, il se met à flinguer tout le monde, en mode sniper comme dans Call of Duty 4. Du coup, Captain America bascule dans un polar tendance guerre froide, avec espionnage et tout le toutim. Le problème des comics dark conspirationniste, c’est que ça commence généralement bien, on voit le héros chatter sur MSN à un mec « qui vous veut du bien » en général sous pseudo Mister Blue et Mister Green et au bout d’un moment, ça bascule dans le péniblement affligeant. Et là, même pas, ça tient la route.

Après 24 numéros mené tambour battant (et a-t-on déjà vu des tambours menant quelque chose sans être battant ?) dont un numéro « House of M » absolument génial dessiné par le monumental Lee Weeks, on bascule dans la tragédie. La deuxième partie de ce run (toujours pas terminé), c’est la mort de Cap. Steve Rogers mord la pouscaille. Une mort de héros, une vraie. RIP. Un sniper isolé + d’autres trucs. Il fait ce qu’il a à faire. Même emprisonné et menotté qu’il était dans un monde post Civil War, il fait bouclier de son corps. Trahi et assassiné, le monde de Cap s’écroule. Sharon, Bucky, Sam (The Falcon), la série bascule dans le deuil. Qui a commandité le meurtre ? Est-il vraiment mort ? Soyons clair : il n’y a aucune vraie idée neuve, tout a déjà été dit ou fait, conspiration incluse, et on imagine déjà ouate mille stratagème pour ramener à la vie Steve Rogers. Mais Bru ne rend pas la tache facile à tous les personnages secondaires de Captain America, devenu tout d’un coup très tridimensionnel face au deuil. Remis de son lavage de cerveau, Bucky ne sait pas exprimer la peine qui le submerge, comme dans ce bar où il se laisse submerger par la colère, seule manière pour lui d’évacuer sa détresse intérieure. Dans cette scène justement, on retrouve la force de la saga « Murdock en prison », aussi écrite par Brubaker (et susmentionnée plus haut). Comme dans Criminals, il sait vraiment parfaitement faire exister ses âmes perdues, sans repères. C’est sans doute la ligne directrice de ses titres et qui fait d’ailleurs que son Uncanny X-men, trop pop, n’est pas à la hauteur de ses polars low-key et de son Bucky.

Le moment idéal pour placer une spéciale pour Steve Epting. Associé à jamais dans mon inconscient avec les pires années des Avengers, il a complètement basculé d’un trait inintéressant de type comics mou de héros random à quelque chose de bien concret. Il a réinventé son style par le noir, un peu comme Brian Hitch, le photo-réalisme en moins.

Troisième partie de ce run époustouflant. Puisant son énergie dans une tradition DC, le sidekick va devenir héros. Bucky va récupérer le bouclier. Il n’est pas aussi bon que Steve, il le sait et modifie son arsenal de combat. Il a désormais un arme de poing au ceinturon, un vrai capitaine. La maladresse dont il fait preuve me rappelle un peu Bond dans Casino Royale dans cette scène brillante : Bond/Craig qui revêt simplement un smoking. Il se regarde dans la glace, ses mouvements sont gauches, il ne se reconnait pas tout à fait. Il n’est pas encore devenu Bond. Et puis au fur et à mesure, ses muscles se tendent sous l’uniforme, il « grow into it », il se fait homme de la situation. Après avoir écrit l’icône, la mort du surhomme, Brubaker nous livre sans doute un des meilleurs récits initiatiques « ever ». Il en profite pour écrire correctement Tony Stark, désespérément badguyisé depuis Civil War. Sam Wilson, The Falcon, l’intime de Rogers prend lui aussi toute sa dimension, jusque dans l’éloge funèbre prononcé pour son ami, complètement off-panel. La peine, le remord, la colère, autant de sentiments récurrents qui surnagent dans ce run très sombre, noir comme un roman russe du début du siècle mais infiniment humain, lorsque les personnages sont poussés dans leurs derniers retranchements. Et arriver à intéresser les gens avec un sidekick mort depuis des années qui revient en soldat coco avec un bras cyborg, c’est juste phénoménal.

Pas fini, mais déjà un classique.

Seul Two

Alors que le L O L français est en deuil, on assiste à de petites germes, des tentatives sporadiques. Seul Two part d’une idée rigolote, deux gugusses qui se retrouvent dans un Paris complètement vide, pas un seul laveur de carreaux dans le champ. A la limite de la pub de parfum angoissante, quand la mannequin se pavane en noir et blanc sur la place de la Concorde alors qu’elle risque à tout moment un coup du lapin en tombant de ses talons hauts.

Bon j’avoue une faiblesse : Il y a… mmfff 7 ans, bon sang, je m’en souviens comme si c’était hier, il pleuvait, j’ai mangé au thaïlandais ce soir-là, c’était dans la partie fantomatique du XVème, à la Convention. J’y ai vu la Tour Montparnasse Infernale. Bref. Overall, c’était une bonne soirée où l’on a bien ri. A défaut de concurrence viable (et ne me relancez pas sur Astérix-Disco-Chtits ou le Pignon), c’était un peu la seule offre d’un genre en perdition totale. Ca allait au moins jusqu’au bout, sans se poser trop de questions, sans cette espèce de retenue idiote, ou de sur-cogitation qui transforme le dit-rire en agitation (voir la fin de règne du duo Poiré-Clavier). Ce n’était pas non plus cynique à la Weber, le côté « j’ai un message à faire passer sur la société, tuvois ». Berk. Seul O.S.S se risque encore avec application à faire du rire pas naze. C’est limité comme offre, mais économique. Même Eric et Ramzi, puisqu’il s’agit d’eux, se sont compromis dans pas mal de croutes irregardables. Double Zéro ou Dalton = souffrance. Mais au moins les gonz avaient le mérite, hors promo sinon c’est pas du jeu, de descendre leur propre merde. Et tant pis pour les bonnes poires qui ont claqué 9€ qui aurait pu aller à un village d’Afrique ou un truc du genre.

Ah ouais mais donc Seul Two. Partons déjà du principe que ce n’est pas abominablement nul. 2 films en un : l’un avec tous le monde, les rues peuplés, des caméos mdr, MC Jean Gabin « j’t’emmerde », deux minutes montre en main d’Edouard Baer en fristaïle etc. Ca, c’est plutôt marrant. Mais il s’agit de séquences qui encadrent le film, comme l’introduction et la conclusion d’une dissertation. Mais Mme Panzani m’avait bien dit en CM2 qu’il fallait bien développer chaque partie sans en foutre des kilo-louches dans le développement. C’est malheureusement le cas ici : on ne voit qu’Eric et Ramzi dans un long, très long tunnel dans lequel je me suis assoupi. C’est comme un sport de combat, faut s’entrainer avant, sinon on finit K.O dès la deuxième reprise. Flashforward, un avion Air France un peu bof. Seul Two repasse et je redécouvre le milieu du film, un peu comme un director’s cut ou un bêtisier décompressé. Ca reste toujours assoupissant (dix minutes pas plus d’ailleurs ici encore), mais en le découpant en petit bout, ça peut survivre à une diffusion télé. Au final, un film mouaif , ce qui n’est pas rien pour un genre devenu « niche » en France.

Ah et voici:

Attention, voici le label officiel robotics de la Magimelxploitation, un logo qui nous permettra de mieux repérer les super films (forcément) de qualité contenant du Benoit Magimel.

Happy-Go-Lucky (Be Happy)

Mike Leigh fait toujours des films ambitieusement puissants. Secret & Lies, drame sur fond de misère sociale anglaise, était juste fabuleux, dense, exalté et exaltant… Et là, on a Be Happy. Happy-Go-Lucky en vo, mais par commodité, on va s’en tenir à cet impératif « Be Happy », un peu nul comme un « Ensemble, c’est tout ». C’est un peu le film Némésis parfait de Secret & Lies, son Yang parfait. Sally Hawkins alias Poppy lève les bras, rit, sourit et te regarde impérativement dans les yeux. On se dit que les 2 heures vont être longues. Mais c’est mal connaitre Leigh. Derrière sa Poppy jovio-histéro se cache un discours beaucoup plus tendu sur la société. En partant du principe qu’il ne peut absolument rien arriver à cette fille, toute forme de dramaturgie classique est complètement neutralisée. Du coup, Mike, il est malin, il truffe son film de personnages secondaires « comme les anglais en ont le secret ». Les très brèves retrouvailles de familles éclatent littéralement à la gueule. Mais pas comme dans Secret & Lies, une violence très rentrée. Le permis de conduire devient une épreuve. On souffre presque pour eux, pour ceux qu’ils portent en eux.

Mais vraiment, à part sa manie de ricaner pour un rien, parfois, Poppy est vraiment charmante, dans le sens élégant du terme XXème siècle. Elle s’occupe d’enfants, et bien. Elle prend le temps de parler à un clodo pas si clodo que ça (toujours le tissu social anglais à la Leigh). C’est vraiment quelqu’un de bien, genre qui ramène son plateau au Starbucks, une file capable de voter Delanoë en 2012. So what’s up ? Le bonheur, l’entrain, la vitalité dérange-t-elle ? C’est peut-être le propos du film.

Internet, la TV, tout est devenu un flot de négativité intense. Tristan dit « le sobre sage » me disait « mais putain, depuis quand tout est devenu si fuckn’evil » prenant en exemple les zilliards de posts négatifs de forums. On a peur pour les Poppy futures. Et je vais vous dire, je me sens parfois un peu honteux de participer à cette pollution numérique car la critique « bouse et daube » est largement plus drôle à faire (et les mecs, j’ai survécu à Injû et à la Possibilité d’une île, je sais de quoi je parle). Mike Leigh c’est la même chose : le biz’ du ciné est devenu une bouillabaisse où il passe pour un gugusse à faire un film sans but clairement souligné, à la limite du trivial après avoir visité les profondeurs de l’âme humaine.

Et pourtant, faut le voir laisser balader sa caméra sur les petits vieux avec la finesse d’un Martin Parr, mais sans ironie. Be Happy est un film qu’on regardera dans 20 ans en se disant « comment a-t-on pu sortir ce film au moment du RSA, de ces débats TV politiques passionnants mais qui servent à rien avec des Zemmour qui répètent exactement le même speech chaque semaine, au moment où Christine Lagarde nous dit que la crise économique ne touchera pas la France, car elle est protégée par les mêmes montagnes qui nous ont sauvé du nuage de Tchernobyl, que Ségo namedroppe des lyrics assassins « ou disparaissez ». Une nouvelle taxe par mois ! Des mecs qui se font poignarder dans le XIXème. Les banques qui déposent le bilan. Non, Be Happy va bien au-delà, malgré son timing un peu fou, poursuit sa thématique de la vérité sociale de Leigh, avec une suite logique dérangeante. Généreusement agressif. Ce mec est brillant.

Rentrée séries 2008: Heroes, Prison Break, 90210, Dexter etc

Maintenant que la série de l’été a pris fin (en fait, elle est terminée depuis le départ de Hakim)

Après la fin des J.O de l’improbable, où France Télévision nous a diffusé de l’athlé comme des nuls… (ici Laurent Luyat qui balance un sortilège “sommeil” niveau 6)

Voici les nouvelles séries de la rentrée. De la rentrée us hein, on parle pas des nouvelles saisons de Plus belle la life et le reste.

Dexter doute. Sa soeur a-t-elle changé de coupe de cheveux ? Bobby Simone / Jimmy Smits en spécial toutes les semaines. Allez on y croit.

Prison Break est devenue une A-Team cachée qui élabore ses plans dans un hangar. Enjeux nullissimes, premier épisode risible, PB avait déjà sauté le requin depuis longtemps, mais là, on a la confirmation.

Shin Beverly Hills a.k.a 90210 tout court. Le show du moment dixit un ami qui lurke les forums de type ok podium. Il se reconnaitra. Ici Kelly discute avec Shannen Doherty mais a déjà du mal à cacher son agacement…

…Alors que tout l’intérêt de la série, soyons franc, c’est le sens du staïle général. Les fringues improbables, les dialogues à fort potentiel (“quoi, tu tiens un blog?!”) et ses acteurs de 25 ans qui veulent nous faire croire qu’ils en ont 16. Ca n’a pas changé, ça (la soeur de Kelly, là, est largement au dessus du barelly legal, je l’ai imdbé pour toi. Riche mais proximité, elle a un ipod.) Et Rob Estès, le cosmo-bogosse est le proviseur tandis que des minets sortis tout droit de Smallville jouent les profs cools. Bande son sans doute bricolée par Itunes Genius (“t’écoute Coldplay, Viva la vida ? Oké alors achète ça aussi”). Combien de temps tiendront-ils ?

Mais l’actu c’est Heroes… qui part d’un niveau si bas que la prod n’avait qu’une seule solution: y aller à fond la caisse, assumer sa propre débilité, quitte à créer une problématique absurde.

Heroes, souvenez-vous, ses horloges avec des kanjis, aussi authentique que la brochette fromage du menu F du Tokugawa Sushi de la rue de la Roquette.

Nathan, qui a déjà survécu à une explosion nucléaire au dessus de sa nuque, revit. Forcément. Mais connement. Il est entré en période biblique tendance “entrez dans l’espérance” dont on a du mal à comprendre l’intérêt. Du coup, la série est en passe de se voir renommer “Cathoes”.

Shuresh nous fait vivre des moments palpitants de blabla science. Forcément, il entraîne dans son sillage le personnage le plus passionant de la saison 2, la chicanos.

Attention moment culte: des dossiers hyper top secret, LE gros danger de la saison, l’ultime plot device, traine bêtement dans le salon, entre le pouf et les boites remplies de vaisselles qui attendent le déménagement. C’est trop bêta quand même. On a jamais vu un plot device aussi stupide.

“Top secret, top secret… voyons voyons, ça pourrait me servir, ça…”

Sinon… The Fly ? Non, désormais, c’est Suresh qui assume pleinement son utilité physiologique à l’histoire et justifie ses heures passées sur un power plate. For da ladiez.

Hiro et son sidekick se baladent dans un décor tiré de “Yakuza” de Sega. On a rarement quelque chose d’aussi faux depuis… l’horloge avec les caractères japonais… Je vous révèle juste un truc: il va se retrouver rue st jacques après. Sountrack accordéon à venir.

Ando, l’homme aux mimiques de folie is back. C’est juste pas possible.

On la croyait morte dans l’incendie causé par le dangereux gang des voleurs de comics ? Eh bien non ! On a eu peur !

Saison 3 qui s’annonce… à fond les ballons, sans aucune forme apparente de logique interne. La Veronica Mars en nulle, Piterpetrelli, la cheerleader qui n’a plus besoin d’être sauvé là, d’ailleurs, c’est comme un melting pot de bonheur hebdomadaire, un peu comme quand on s’enchaîne les émissions politiques du week-end avec des plateaux riches en Moati Vs Bayrou. Battlestar Galactica, ça sera pour plus tard.

La cité des hommes

Incité par la torpeur d’une péloche cracra, comme jaunit par un chaudron, Hibou le chef de gang décide qu’il est temps d’aller se baigner. 3 ans que son posse n’avait pas descendu de sa base perchée sur les favelas. Il ne se rend pas compte que son second, Balladur, prépare son coup en douce pour lui choper sa place. Les deux héros de la série TV (même titre, pratique) ont grandi. L’un est même accidentellement père. C’est compliqué, mais il essaye de pas laisser trainer son fils, pour pas qu’il lui ramène du vice.

Derrière ses clichés et son foot, le Brésil est le modèle sociétal vers lequel la France se dirige inéluctablement. Ca me parait tellement évident que c’est sans doute le laïus politique que je maitrise le mieux, même bourré : La ségrégation raciale et les castes maintiennent 3 couches de sociétés parfaitement distinctes : les milliardaires intouchables, immensément riches. La classe moyenne, elle se fait de plus en plus pauvre tandis que les favelas recueillent les plus pauvres. Il n’y a aucune mobilité vers la première catégorie, seule la classe moyenne peut vivoter dans la peur de ne pas tomber dans la dernière qui elle-même n’a aucune forme d’élévation possible, si ce n’est la classe moyenne, celle qui pourtant fait marcher l’économie. Pour cimenter le tout, il faut une police forte, une puissance répressive forte qui protège bien évidemment la première caté. Lyrical drop d’Ärsenik (t’as vu) “L’espoir fait vivre, mais ceux qui vivent d’espoir meurent de faim”. C’est vers cela que se dirige la France et les symptômes sont nombreux.

Forcément ce ghetto movie sauce brésilienne a pris une tournure plus intéressante que prévu, alors qu’il ne montre finalement qu’une histoire de deux mômes, élevés dans les favelas, mais pourtant ultra positif. L’un bascule presque mal, mais en fait même pas. L’autre recherche son père mais au final, son barbu est un escroc. La thématique est toute trouvée, la paternité. Nothing new ? La cité des hommes développe une forme d’élégance morbide dans son propos. Les gangsta si crâneurs finissent par mourir comme des mouches, presque de manière suggérée. En bédé, on dirait « off panel ». Pouf, tu le croyais mort, et finalement non, le boss peut se faire flinguer dans une ruelle comme un guest dans une série TV de flics lambda. Ce contraste est accentué par cette réa décousue avec classe, passant de la chaleur mélancolique à la froideur d’une rue ghetto. Un climax assez ambitieux mais ça tiens vraiment debout.

Top crédibilité ciné bonus : les flashbacks sont tirés de la série TV. Les mêmes gars. On est loin des films mous du genou avec des mômes engagés sur vague ressemblance.

Secret Invasion

L’alternance pour moi, c’est d’écrire un article positif, puis une casse. Comme ça, feng chouilli, karma et compagnie. Il y a énormément de trucs bien qui mériterait un éclairage robotique, mais là, Secret Invasion me saute à la gueule de part sa construction « deux ans d’âge mental ». Pourtant des crossovers nuls, on en a lu depuis les années 80. Avant Secret Invasion, il y avait tout un travail d’infiltration pour nous faire comprendre que wow c’est grave, les extra terrestres sont parmi nous et depuis longtemps. Enfin depuis longtemps, faut voir. New Avengers, ça remonterait à 40 numéros, mais il s’est passé quoi durant ce temps ? 4,5 aventures ? Pas beaucoup plus. Mighty, c’est pire encore. Depuis les deux titres servent à exposer des points aussi important que l’alliance entre Pierre Moscovici et Arnaud Montebourg lors des universités d’été du PS, mais bon on y reviendra. Il y aura beaucoup de “et on y reviendra”.

On ne peut non plus se lancer dans Secret Invasion sans évoquer House of M, précédent gros crossover signé Bendis, « l’artisan ». Après 1 numéro d’intro, on est tombé dans un elseworld ultra décompressé qui se passe dans la tête des héros dans une vie alternative (vous voyez), avec une Layla Miller (rien à voir avec le personnage ultra attachant qu’on connait aujourd’hui) qui rendait la mémoire aux X-men et aux Avengers présent dans cette bouillabaisse. Deux cliffhangers identiques (la tombe de Xavier, symbollzzzz), Quicksilver opportunément utilisé comme bad guy. Vousvoyez, c’est le fils d’un criminel de guerre, c’est forcément un méchant. Et puis le fameux « no more mutants », pas vraiment bien utilisé par Marvel pour rediriger ses X titles, en roue libre complète (on en était encore alors vers le 4 ou le 5eme d’Astonishing, plus de 3 ans déjà…). House of M, malgré son très joli dessin de Coipel a vraiment été pénible à cause de son contenu mais surtout de son tempo. Secret Invasion souffre malheureusement des mêmes stigmates, transpercé continuellement par son manque d’idée et par sa gestion du temps absolument catastrophique. Et au moment où ces lignes sont tapées, on en est au numéro 6 de 8, à 4 dollar pièces. Entrons dans les détails. (dernière chance pour relire l’intro ici)

Le premier numéro commence par Stark qui montre le corps de la fausse Elektra skrulisé à Pym et Reed Richard. Comme un air de déjà vu ? Bah ouais. Les new Avengers l’ont vu et ont eu le temps de disserter 4 numéros autour du cadavre. Puis Stark l’a montré à Reed et aux autres Illuminatis, ce qui a forcé le faux Black Bolt à se découvrir. Euuu pourquoi d’ailleurs ? Il aurait tout aussi bien joué l’incrust’ et joué la parano mais non. Tout l’angle pré-secret invasion repose sur la même chose que Battlestar Galactica depuis 4 ans : “qui sont les Cylons ? Sont-ils parmi nous ?” Alors pourquoi diable se découvrir ? Le pouvoir des Skrulls, c’est de prendre n’importe quelle forme, et là c’est pire, ils sont indétectables. Comme un jeune Giscardien dans la rue. Mais l’heure a sonné de faire le gros crossover du printemps (on est en septembre là). Bliblip fait l’alarme, un jet Skrull (justement) s’est écrasé à Savage Land. Oh joie. Savage Land, pour les non initiés, c’est là où on envoie les Xmen quand on ne sait pas trop quoi faire avec eux. C’est ça ou l’espace Shi’ar. C’est loin, mais il y a des dinosaures. Les New Avengers, très pressés d’aller dans ce trou du cul perdu où ils se sont déjà retrouvé à poil (N.A N°4) volent un Quinjet. Facile à faire, ils balancent du papier tue-mouche sur Black Widow justement de garde et se cassent avec. Un truc qu’ils ont pécho dans un album de la Ribambelle, pour les amateurs de bédé franco-belge.

Ils arrivent, suivi par les mighty, soudain, boum, Windows Vista édition Iron Man crashe, et tout se pète la gueule. Jarvis, le majordome est un skrull, tout comme Dum Dum Dugan, Hank Pym et Sue Richard dont on devine que le remplacement ne date que d’il y a quelques minutes sinon ça va faire de grosses traces de continuité.

Mais Jarvis. Sérieusement, imaginons que vous essayiez d’envahir… mettons la Suisse… ou mieux la Belgique, vous choisiriez la dame pipi du roi des belges comme haut point stratégique. C’est ça qu’ils préparent depuis des années ? J’ai envie de dire zyva, tu prends Iron Man, Captain America, Cyclops, Wolverine mais déjà fait enfin un mec qui était dans un des jeux de baston Capcom. Un puissant quoi. Même Iron Fist, parce qu’il fait du Kung Fu et que c’est cool. Pendant des mois, on nous a collé des couv avec tous les persos Marvel (TOUS) avec un menton Skrull, que ça fait vachement peur, pour au final avoir Jarvis, Dum Dum et Pym ? Jeeez, quel newbie se souvient encore de l’importance de Dum Dum quand il faisait le garçon coiffeur qui servait de fronton à la base Shield la plus classe du monde. Un fuckin’ salon de coiffure ! Shield, retenez bien, on y revient plus bas.

Maintenant qu’ils sont tous à Savage Land (ils ont même pris Spider-Man parce qu’il avait un peu de temps devant lui), le Jet s’ouvre et sortent des super héros, mais en version plus vieille, époque Secret Wars. 80’s. Pas besoin d’être un devin pour comprendre que c’est des Skrulls. D’ailleurs on le sait dès le même numéro. Quel est le suspense ? Aucun. Mais la stratégie est simple : pendant qu’ils sont à Jurrassic Park, les MECHANTS ATTAQUENT NEW YORK. Mais à quoi ca rime que les gentils comprennent que les faux héros sont des skrulls 5 mn après ? C’est aussi le problème du crossover : un numéro dure 5 mn en temps réel. Sans exagérer. Deux remarques d’importance : combien de temps les skrulls croyaient-ils que les héros allaient rester là bas ? Le temps de faire des Knackis au feu de bois ? Parce que ça dure jusqu’au 5ème numéro. Hawkeye croit retrouver sa meuf décédée, Sentry est traumatisé par 3 phrases du faux Vision (hop un deus ex machina pour plus tard), tandis que Spider Woman (une skrull en fait) essaye de faire croire à Stark, en pleine crise intestinale depuis son virus, qu’il est un skrull aussi.

Leinil continue à dessiner les cases à l’envers en mode manga. Ici Sentry est en bas alors qu’il est, la page d’avant, dans la dépression spatiale. A noter les dialogues de Hawkeye. Hut !

Les autres se battent, jusqu’à ce que (je me permets de faire un saut dans le temps) Reed Richards, momentanément capturé, revient avec son gogo gadgetopistolet qui a le pouvoir magique de débusquer les imposteurs. C’est comme la machine à faire le beau temps dans les Schtroumfs, on sait pas comment ça marche, ça débarque, comme ça, un volume, mais c’est bien pratique. Pendant ce temps, pour sauver les Young Avengers et ce qu’il reste de l’Initiative à New York, débarque les Secret Warriors mené par Nick Fury qui n’était pas apparu en public depuis genre fin 2004. A l’époque, Gregory Lemarchal gagnait la Star Academy, la DS sortait dans le commerce et Yasser Arafat mourrait. Ca fait un bail. Ses Secret Warriors, c’est une bunch of nobodies recruté pendant son absence : Quake. Phobos. Yo Yo. Druid. Hellfire et Stonewall. Un pseudo déjà utilisé par un keum chez Claremont. C’était ça son plan ? Entrainer des mecs pour débouler avec des gros guns qui font pitié comme dans les années 90 ? C’est nul mais admettons. Enfin même le gus qui fait la couv suivante s’en fout, il met en scène Fury avec les young Avengers. Ils repartent d’ailleurs dans leur base secrète, pouf.

Mais où est passé fan-favourite Yo Yo ?

Les méchants regardent la scène de la fenêtre et se disent qu’un monde sans autoradio à chouraver, c’est vraiment moins drôle. Mais le plus excitant et intriguant, c’est le cliffhanger du numéro 4, la moitié du cross : Kraaakoum fit le tonnerre, foup le bouclier étoilé. Thor. Captain America. On se dit ouais, enfin un cliff pas mal. Bah pas la peine d’y songer, on ne les voit pas dans le numéro suivant. Y’avait pas la place. Déçu ? On y reviendra.

Un dialogue riche.

Le numéro 5 montre l’agent Brand (vous savez, la nana aux cheveux verts d’Astonishing) qui libère Reed Richards.

Woof

Ils bikravent une navette spatiale skrull aussi facilement qu’un Cayenne dont ils ont changé les plaques, filent sur Savage Land et Reed utilise son pistolet magique sur les skrulls. C’est trèèès bête mais au moins ça a le mérite d’en finir. Mais pourquoi ne pas avoir tué Reed ?

Spotlight sur Mighty et New car ça le mérite. Deux numéros de Fury qui se rend compte qu’il y a des Skrulls, un autre où il monte son Power Pack puis on passe à Khoi Pham qui dessine mochement. Un numéro pour nous montrer que les Skrull comprennent que Sentry est un peu maboul (noooon sans blague), un autre où on voit Pym qui se fait kidnapper et aussi comment la fake Elektra intègre the Hand. 5 numéros de Mighty. Une idée par numéro. UNE SEULE ! Des trucs qu’on n’a pas besoin de savoir en fait. Mais New, c’est PIRE. Le talent de Cheung est gâché pour une histoire de reine Skrull. Bon oké. Admettons. On voit aussi les skrulls faire de faux cobayes des Fantastic four pour voir « leur réaction », comme des rats de labo. Puis c’est Billy Tan au dessin… On apprend ce qui s’est réellement passé dans le numéro 4 de New Avengers. Des skrulls, l’auriez vous deviné ? Non ? Bah 24 pages de plus pour le surligner au stabilo. Puis Cheung à nouveau, le pauvre, pour nous expliquer ce qui s’est passé dans New Avengers 1, 2004. Je vous le donne en mille: des Skrulls. La fausse Spider Woman a payé Electro pour faire Prison Break. Puis re Billy Tan pour nous montrer comment ils ont fourré ces faux héros dans le jet qui s’écrase au début du cross over. Aviez-vous besoin d’autant d’explication ? Who needs that shit ?!

Allez encore une dose : Mighty Avengers 17, c’est les skrulls eux même qui se battent entre eux : Pym Skrull est aussi cyclotimique que l’original, et donc, tel Chevènement, il se rebelle. Forcément, ils le tuent. 24 pages de ça… Mais le pire du pire est atteint par le dernier New Avengers. Les skrulls se bricolent des faux Reed Richards, qu’ils manipulent pour mieux l’imiter, le comprendre et prévoir ce qu’il va faire. Ils le re torturent, tuent, re torturent, l’analyse, tuent sa famille devant ses yeux, tout ça comme des savants. Donc on admet qu’ils le redoutent, qu’ils savent ce dont il est capable. Alors retour à la question précédente : POURQUOI L’AVOIR ETUDIé PENDANT DES ANNéES pour ne PAS LE TUER quand l’occasion s’en présentait ? Pour qu’il se libère et fabrique un piou piou magique. C’est pas logique. Genre 12 comics et plus et c’est pas fini. 12 numéros de vide intersidéral à ajouter à un crossover lentissime. Et surtout, ce dernier numéro où le Reed se fait torturer pendant 20 pages… bah j’ai été pris, comme un vieux con, de regret. Roy Thomas. Roger Stern. Perez. Byrne. Kirby. Stan Lee. Fuck quoi. On aimait quand les Avengers, c’était Cap, Iron Man, Thor, Hawkeye, Vision, Hercules, même Black Knight, Captain Marvel. Mais un fake Reed qui se fait torturer, pour m’apprendre quoi, que les Skrulls sont bêtes et cruels, mais calculateur ? Bah désolé, je préfère lire les cahiers saumon du Figaro.

Bouclons ce tour de piste : Secret Invasion 6 : Wasp ose susurrer un « comment auraient ils pu faire autant de mal à New York en si peu de temps ». Biatch, j’ai payé 3,99 dollar fois 6 pour ton crossover mal timé. On a droit à… une grosse splash de la ville en feu… On va finir par le savoir que New York is on fire depuis day one ! C’est comme si NTM nous chantait aujourd’hui que c’est l’urgence dans les banlieues, alors on le sait depuis le fucking premier album. On a droit à une scène de citoyens qui accueillent les Skrulls comme des sauveurs.

Shape-shifting alien dick, mmmm, collaborons…

Vous savez comme dans V ou dans Indepedance Day, les premiers à cramer. Pour le civil, on a Secret Wars Front Line, on aurait pu avancer de deux trois pages, mais on est plus là. A la fin du numéro, Captain America et Thor se rencontrent. « tiens c’est toi ? T’as changé ? » et l’autre répond « wesh gros , t’étais pas mort au fait ? ». Je caricature à peine. Et c’est TOUT. UNE PAGE. C’était pour les mecs impatients du cliffhanger en plan depuis le numéro 4. Mais comment peut-on appeler ça du bon tempo ? Viennent les deux doubles spread finaux, où tout les héros s’unit comme dans un film de Mel Brooks : Iron man, Thor, Venom, Spider Man, Norman Osborn. Mais c’est pas très réussi. Le style crayon tchic tchic de Leinil Francis Yu est loin de rendre aussi bien que… Perez, au pif. C’est “mouaif”, quand il dessine pas des cases à l’envers. Mais il case un Howard The Duck. Cool hein ? Chacun de ces spreads, on a un peu l’impression d’en avoir vu 120 comme ça, comme ses ninjas fights sans fin époque New Avengers.

Mais par dessus tout, vous l’aurez compris, ce crossover est déjà un puissant échec narratif. Il ne reste plus qu’une seule voie pour s’en sortir : un final pas trop nul. Mais vous connaissez Bendis. Il a foiré de super arcs de Powers avec des fins nuls. House of M, ils se sont claqués la bise et puis bye. Daredevil, sa meilleure fin, c’est celle qui lui a été soufflé par Brubaker pour bien commencer son arc à lui. Du coup je regrette World War Hulk, Annihilation, les trucs qui balancent, qui jouent avec les codes mais surtout surtout qui ne nous font pas perdre notre temps. Secret Invasion, c’était quoiqu’il arrive, une perte de temps pour un fric fou.

Et surtout, quel nom de crossover pourri: où est LE SECRET quand on envahit le monde avec des navettes spatiales géantes et qu’on préfère se battre sur un champ de bataille alors qu’ils peuvent se planquer dans n’importe quelle ruelle et passer inaperçu en se faisant passer pour le premier François Hollande venu ?! Ca n’a pas de sens ! Il est très possible que cette nullité soit prouvable médicalement parlant.

Gomorra

« La science dans la rue, c’est de savoir prendre des raccourcis » nous mitraillaient le flow d’Ärsenik. En ne choisissant pas cette voie, Gomorra a opté pour la difficulté. Tout y est non-sexy, cracra, en ruine ou au mieux, à l’abandon. La Camorra contrôle tout. S’entremêlent quelques personnages sans aucun rapport si ce n’est qu’ils sont à différentes extrémités de la chaine. Un jeune qui va se faire engrainer, le vieux qui creuse des trous pour y jeter des ordures, un couturier pris dans la machine et puis surtout 2 guignols gangsta’ wanabees dont on se dit à chaque minute qu’ils vont se faire victimer comme dit Rohff, autre expert en street survie. Problème, on relate pas forcement. Aux ritals, hein, pas à Rohff.

Violent, Gomorra surnage avec son côté caméra à l’épaule grâce à quelques moments plus intenses, plus touchant, où les personnages représentés finissent par devenir tridimensionnel (le final du couturier et du rapace de la finance, sublime). Monté en suivant une rigoureuse check-list, cette F.A.Q de la mafia, malgré ces petites envolées bien senties, a trop des allures de docu touche à tout pour devenir un bel objet ciné. Mais y’a vraiment de l’idée.

Valse avec Bachir

Valse avec Bachir aurait pu être un de ces dessins animés moches et tristes sur la guerre comme on en a déjà vu pas mal. Mais sa construction habile autour de la réminiscence d’un soldat (le réalisateur), de la manière dont il a refoulé les massacres de Sabra et Chatila. D’emblée, on va écarter le propos ayant pour trait l’animation. Lui ouvrant les portes d’un public beaucoup plus large (la plupart des spectateurs de Bachir venu de la japanim’ ont-ils jamais vu un seul film en hébreu de leur vie ? Paf, dans ton ouverture), il s’exclue néanmoins de toute formulation documentaire pendant 2 heures, jusqu’à ce que des images d’actualité interviennent, tout comme dans « le cahier » (film irano-afghan sorti cette année, critique à venir ici quand y’aura le temps). La durée, parfaite compte tenu du contexte de la lutte pour recouvrir la mémoire, rend encore plus douloureuse cette claque du retour à la réalité. Ari Folman, le réa /auteur/personnage principal, part à la recherche de ses compagnons d’armes, désireux de faire la lumière sur des cauchemars qui le hantent depuis qu’il a servi au Liban.

Une critique revient régulièrement : certains (vous savez, ces discussions de fin de soirée où le ton monte un peu) y ont vu une tentative de dédouanement de Tsahal. Ce qui ne m’a pas l’air d’être le cas. Au contraire Ari, tout comme dans Beaufort, évoque son impuissance, lui et celle de ses camarades. Que le procédé d’Ari, réel ou pas, importe peu, il a absolument le droit de s’autofictionner. D’autre part, j’ai pu constater ce refoulement, processus un peu extrême mais classique chez les survivants des tragédies des soixante dernières années. Des horreurs que les gens de fin de repas ne se rendent pas forcément compte. On est puceau de l’horreur comme on l’est de la volupté. Envoutant jusqu’à l’hallucination, cette fameuse « valse », instant d’envoutement et sans doute un des plus grands moments de films de guerre panthéiste depuis Thin Red Line, Valse avec Bachir avance consciencieusement avec une vraie pâte Mallickienne doublé d’un vrai discours politique remettant en cause l’efficacité de Tsahal. Contrairement à de nombreux pays, c’est de l’intérieur qu’Israël se critique, comme une réponse à un pouvoir politique inanimé. Le contraire de Valse avec Bachir, une critique d’un genre nouveau. Bravo.