L’évènement de l’été et, soyons fou, quasiment de l’année, c’est ce nouveau phénomène des “comédies pour femmes”, revendues aux médias comme une révolution au même titre que les femmes dans l’armée ou Anne Sinclair “la femme courage”. Donc, en 2011, on va voir ce qu’on va voir. Dans Bridesmaids, c’est tellement la révolution qu’on voit des femmes se faire dessus.

L’idée même d’un concept d’humour ciblé m’énerve, dans la mesure où il attenue ce que je préfère, l’universalité de l’humour. Les films des frères Coen seraient-ils moins pour femmes ? Et ne rentrons même pas dans le débat Woody Allen…

Cependant, au sein de ce néo-genre se dessinent de nombreux points communs et mêmes des tendances lourdes, évoqués dans ce très bon article sur la buddy-isation de l’élément “Boyfriend” dans les comédies romantiques. Robotics revient sur les deux exemples les plus emblématiques d’une année globalement assez pauvre en comédie avec comme emblème The Hangover 2, copy carbone du premier. 1 sur 5 pour lui, comme ça, c’est fait.

 

Bad Teacher a le mérite de ne pas changer de titre en français. Mais il aurait clairement du s’appeler Mauvais Casting. Cameron Diaz vit ses dernières années de bonasse donc elle profite à mort, cf Knight & Day après une tentative de vrai acting, remember The Box. Elle incarne cependant une prof qui déteste son job et qui se retrouve, malgré ses efforts démesurés, plaquée par son mec, un riche qu’elle exploitait. Elle ne rêve plus qu’à un truc, un seul (et on est prié de croire à la mise en place de ce scénario débile mais qui se prend au sérieux) : se refaire les seins. Tout ça pour séduire “Gentil Prof remplaçant” joué par Timberlake. Comme si elle était dans l’ignorance de son statut de belle fille.

Ok, stop ça ne tient pas, la fille est une vénale insatisfaite de son corps, éconduit “Gros prof de gym à l’humour sarcastique”(Jason Segel, parfait de nonchalance Apatowesque en attendant les Muppets, le movie), mais fait quand même du sexy car wash pour les bonnes œuvres qui financeront son opération mamai… STOOOOP deuxième fois. RIEN ne fonctionne ici : elle est parfaitement consciente d’être turbo bonasse puisqu’elle organise ce car wash hyper sexy pour que les mecs de la ville raboulent des thunes… Tout ça pour se refaire les seins parce qu’elle n’est pas sure d’elle ? Awkward plot is awkward. Heureusement, au contact de Jason Segel, elle comprend qu’en fait, elle aime aider les enfants en contredisant tout le reste du film et que finalement, l’important c’est pas la richesse matérielle mais la beauté intérieure. Qui fait des cunni. Fin.

Bridesmaids (mes meilleures amies, LOL) a été la seule dose annuelle de films Apatowesque dont je m’efforce de parler ici systématiquement. Enfin à part le récent 50/50 qui en réunit les acteurs et le ton, mais c’est une autre histoire.

On retrouve parfois dans Bridesmaids le contour de l’Apatowisme, quand il nous décrit des personnages humains, sans jugement, en leur donnant la possibilité de littéralement déployer leurs ailes. Pourtant l’héroïne de Bridesmaids ne montre pas son héroïne sous un jour très favorable. Raté, mauvaise amie, un peu vénale, volontiers superficielle…

En fait, elle n’est pas si éloignée de Cameron Diaz. Elles poursuivent un peu ce même idéal en couchant avec ce mec super beau. Justin d’un côté, Jon Hamm, le bogosse de Mad Men. J’ai googlé pour vérifier à nouveau, tu peux pas test le mec. Et toutes les deux sont si superficielles qu’elles ne se rendent pas compte que le bonheur, c’est finalement ce mec bourru un peu patapouf qui gravite autour d’elle. Ce qu’elles cherchent (et spoiler, qu’elles trouvent à la fin), c’est ce “dude”, avec qui elles pourraient aller boire des bières. “Coz he’s cool”. La fille de la comédie US estampillée ‘pour filles’ cherche un gars, un pote, un bonhomme qui la fera jouir, car il est à l’écoute, lui. Mais faut arrêter de croire au bégé.

Et ce n’est qu’après un long voyage pavé de gags et de fausses routes qu’elle comprendra que “y’a pas que le physique qui compte”. Ce qui m’amène à ce point, peut-être le plus important, celui qui m’énerve le plus avec ces comédies malhabilement markété pour les filles.  On a vu que ces nanas qui “avaient perdu le sens des valeurs” mais qui finissent par trouver un gars à la bien, limite plouc…. Hé bien ce mec-là est systématiquement moins beau que le mirage dont elle était amoureuse. Sans déconner, connaissez-vous une seule comédie romantique où le bel étalon opte pour la fille la moins jolie ? À part Dirty Dancing et goûts particuliers ? Peut-être Bridget Jones… Quoique, considérer Colin Firth comme le moche de Hugh Grant, c’est un choix à la Russel Crowe / Joaquin Phoenix. Alors qu’un laid protagoniste masculin d’une comédie, tu peux être certain qu’il va réussir à lever sa beauté. Quel détail énervant…

Pour finir, je tiens à citer Ed Catmull, co-fondateur de Pixar (que j’avais déjà mentionné dans cet article consacré à Disney). Dans ce long exposé, il explique que ses films fonctionnent car ils ne sont pas imaginés “à hauteur d’enfant”. Ils n’aimeraient pas ça. Et plus généralement, ça foire quel que soit le public. Bad Teacher échoue car il n’a pas de hauteur du tout. Seul Jason Segel est à sauver. En deux répliques, deux vannes qui plus est, il donne à Cameron Diaz une chance de se rendre compte à quel point elle incarne un personnage mal écrit. Bridesmaids est plus ambigüe, tente n’importe tout et n’importe quoi et essaye toujours de se remettre sur la même longueur que son public. Dommage aussi, la meilleure scène a été coupée pour la foutre sur DVD.

Profitez s’en pour la voir avant qu’ils n’aient l’intelligence de la couper à nouveau.